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Les billets de October, 2015 (ordre chronologique)

Centralité des unes…

En sortant de l’université Paris 8, hier, j’ai photographié cette affiche:
afficheeglise20151005Cette image est une bonne représentante des affiches produites par des églises noires d’Île de France. Petite différence avec l’affiche moyenne, ce poster fait figurer une pasteure, une prophétesse, en position centrale. La féminisation du protestantisme évangélique et pentecôtiste est une réalité… étudiée dans un ouvrage qui vient de paraître, sous la direction de Gwendoline Malogne-Fer et Yannick Fer Femmes et pentecôtismes. Enjeux d’autorité et rapports de genre (Genève, Labor & Fides, coll. “Enquêtes”, 295 p., 2015), dans lequel j’ai écrit un chapitre, «Centralité des unes, autorité des autres. Des formes genrées de hiérarchie dans les Églises évangéliques « noires » de la banlieue parisienne», qui porte sur la mise en scène de ces affiches, et la position de minorité qu’y occupent les femmes.

D’autres présentations de l’ouvrage se trouvent sur le blog de Bernard Boutter, le blog de Sébastien Fath, le blog de Yannick Fer ou encore le blog de Gwendoline Malogne-Fer

Voir aussi Tenir le haut de l’affiche (une liste de mes articles sur ce thème).

Cinquantes nuances de trop

Vous parcourez peut-être ces lignes parce que vous venez de lire le billet publié dans Le Monde, à la une du cahier « Science & Médecine » du mercredi 14 octobre 2015, et que vous avez voulu en savoir un peu plus ?
J’ai choisi cette semaine de mentionner un texte de Kieran Healy, Fuck Nuance (“Au diable les nuances”), communication présentée au dernier congrès de l’association américaine de sociologie. Kieran Healy est sociologue à Duke University. Il est l’auteur de travaux sur la visualisation des données, par exemple sur les décès par arme à feu aux Etats-Unis. Je signale aussi ce billet, “De l’usage des métadonnées pour retrouver Paul Revere”.
Vous trouverez sur son site d’autres informations.

Sa communication a suscité plusieurs réactions, à l’extérieur de la sociologie notamment :

  1. http://chronicle.com/article/Is-Nuance-Overrated-/232771/
  2. http://publishingarchaeology.blogspot.fr/2015/09/against-nuance.html
  3. http://www.env-econ.net/2015/09/fuck-nuance.html
  4. http://secondlanguage.blogspot.fr/2015/09/fact-and-nuance-3.html
  5. http://bigthink.com/neurobonkers/the-problem-with-nuance-for-the-sake-of-nuance
  6. http://thesphinxblog.com/2015/09/09/bollocks-to-nero/
  7. http://dailynous.com/2015/09/02/a-bias-against-simplicity/
  8. https://redflag.org.au/article/nuance-hell-drug
  9. http://taylorholmes.com/2015/09/09/our-extreme-nuancing-trend/

et en français sur Slate par Aude Lorriaux : http://www.slate.fr/story/106247/fuck-nuances-sciences-humaines-surplace

Victorine Benoît

En cherchant d’anciennes listes nominatives de bacheliers, je suis tombé sur cet entrefilet, publié dans Le Figaro en 1875 :

victorinebenoit1
lien vers l’article sur Gallica

Le destin de cette bachelière fut-il de servir de “répétiteur” à ses enfants ?
Parce qu’il n’y a pas eu beaucoup de bachelières en 1875, il est assez aisé de retrouver son identité : il s’agit de Victorine Françoise Henriette Benoît. Elle obtient une bourse, en 1877, pour étudier la médecine. : elle obtient 300 francs, pendant plusieurs années.
« Sans vouloir encourager les femmes dans l’étude du grec et du latin », la commission départementale recommande une bourse annuelle de 1000 francs :
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source : Procès verbaux des séances du conseil général de la Vendée (23/12/1877)

Sur twitter, @hellaime m’indique qu’on retrouve Victorine Benoît en 1883 : elle a soutenu une thèse de médecine à Paris De la paralysie spinale infantile [lien].
Et Le Figaro rend compte de cette soutenance, en saluant la jeune doctoresse “Française, Française et Vendéenne” :
victorinebenoit2
lien vers l’article sur Gallica

Le Journal des Débats nous précise même que Victorine est d’une “honorable famille vendéenne”.
Une lettre de remerciements a été publiée par le conseil général de Vendée :
victorinebenoit3

Un journal féministe, La Femme (juin 1884) nous donne, quelques années plus tard, quelques informations sur les sœurs de Victorine, Gabrielle et Adèle, qui obtinrent toutes deux aussi le baccalauréat.

En 1886, le quotidien Gil Blas lui consacre un long portrait : Sous “Mademoiselle X… Docteur-Médecin” se cache de manière évidente Victorine Benoît (aînée de cinq enfant, père décédé, sœurs bachelières, originaire d’une région de l’Ouest, etc…) :
victorinebenoit-portrait
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Vers 1889, elle cherche à obtenir un poste de médecin des écoles primaires de filles, à Paris :

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lien vers l’article sur Gallica

On retrouve, un peu plus tard (en 1896), Victorine Benoît exerçant rue Miromesnil à Paris. Elle fait donc partie des rares doctoresses à exercer la médecine.
Avant cela, on pouvait la voir décrite comme une examinatrice, en 1892 :
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lien vers l’article sur Gallica

ou comme une personne “prodigant des soins intelligents et dévoués aux jeunes filles des écoles”.
Je n’ai pas trouvé aisément d’informations postérieures à 1896, mais selon la Préfecture de police elle exerce toujours, en 1918, rue de Miromesnil (à 71 ans). Les listes indiquent “Mlle” : Victorine Benoît ne s’est pas mariée.

L’espace social des modes de suicide

On trouve sur Gallica le Compte général de l’administration de la justice, dans lequel on trouve de grand tableaux présentant les modes de suicide par profession, à partir des années 1840.
comptegeneral1840
Les différentes professions ont des suicides privilégiés. Les militaires préfèrent les armes à feu, les meuniers la pendaison. Les artistes et les clercs l’asphyxie par le charbon, et les étudiant.e.s se tranchent les veines.
Voici deux graphiques issus d’une Analyse en composantes principales.
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pcasuicideindiv
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Le premier axe oppose la pendaison et la noyade aux couteaux et autres rasoirs, mais aussi des professions rurales aux professions urbaines. Le deuxième axe oppose le fusil à l’asphyxie, les professions chargés du maintien de l’ordre aux professions intellectuelles.

J’aurai du produire, dès le départ, une analyse de correspondance. Ca me semble plus parlant :

casuicide1840

Quelques prénoms bien corrélés

Dans un monde idéal, je disposerais d’informations nominatives individuelles comportant une indication sur la profession des parents. Dans le monde réel, je dispose d’éditions récentes du Fichier des prénoms, qui nous donne, pour chaque département, le nombre de bébés nés chaque année et portant tel ou tel prénom.
D’autre part les données des recensements nous indiquent la proportion de cadres, d’ouvriers, d’employés… dans la population active des 25-54 ans.
L’idée était de trouver des prénoms “bien corrélés” à certaines PCS. Voici quelques graphiques pour l’année 2012 (bébés nés entre 2010 et 2012, recensement 2012).
Ces corrélations écologiques risquent toujours de nous tromper. Dans les départements où il y a beaucoup de cadres, les prénoms Vadim et Brune sont plus fréquents que dans les départements où les cadres sont peu nombreux… Mais sont-ce les cadres qui appellent leurs enfants ainsi. C’est possible, c’est probable, mais ce n’est pas certain.
prenomscorreles2012