Sur quels éléments s’appuyer pour étudier vibromasseurs, godemichets et autres gadgets ayant en commun d’avoir été un moment considérés comme obscènes ? Il n’existe pas encore d’histoire de ces objets et les travaux académiques qui leur sont consacrés sont rares. Le foisonnement récent de discours au sujet des « sex toys », s’il permet de repérer un travail de mise en norme, ne convainc pas. Un détour vers les années 60-70 peut apparaître utile : la rareté du discours lié au contexte d’interdiction de la pornographie a des effets de connaissance renforcés par le contrôle policier du commerce. Avant la légalisation de la pornographie qui semble entraîner l’arrêt des condamnations pour « outrages aux bonnes mœurs » et qui interviendra au cours de la première moitié des années soixante-dix, c’est un commerce sous contrainte, surveillé et décrit par des policiers.
- Références : Baptiste Coulmont. « Les économies de l’obscénité. Circuits sexuels et sexués du godemiché », in, Anstett, Élisabeth et Gélard, Marie-Luce (dir.). Les objets ont-ils un genre ? Culture matérielle et production sociale des identités sexuelles. Paris, Armand Colin, 2012, pages 155-172
- Version préliminaire de “Les économies de l’obscénité” sur hal-shs
Présentation de l’ouvrage : Les recherches menées sur la culture matérielle ont depuis une vingtaine d’années largement interrogé les usages sociaux des objets, en étudiant leur dimension économique, religieuse, politique ou symbolique. Pourtant, et de façon assez paradoxale si l’on songe à la façon dont s’est déployé le champ des Gender Studies depuis les années 1970, la question de savoir si les objets ont un genre n’a jamais été posée en tant que telle, pas plus que celle de savoir ce que le genre faisait aux objets. C’est précisément sur ces questions que se sont penchés les auteurs de cet ouvrage, qui ont souhaité interroger la production sociale des identités sexuées en partant de la culture matérielle.
Ouvrage interdisciplinaire, Les objets ont-ils un genre ? rassemble ainsi les contributions d’anthropologues, d’ethnologues, de sociologues et de conservateurs de musées qui se sont appuyés sur l’étude d’un ou d’une série d’objets (outils, vêtements, bijoux, ustensiles) pour examiner comment et dans quelle mesure ces artefacts participaient à la construction des identités sexuées. Cet ouvrage invite à cet égard à l’exploration des multiples interactions entre culture matérielle et construction du genre, et ce, dans les configurations sociales et culturelles contemporaines extrêmement diverses mais toujours directement mises en lumière par la fabrication et l’usage de ces objets.