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Les deux formes du capital social

Billet publié le 24/07/2004

Il y a quelques mois maintenant, Brayden King, dans son blog, rendait compte d’un article publié dans l’American Sociological Review. The prestige of academic departments :

a department’s prestige is not only a function of quality of research and publications, but also a result of accumulated social capital – or, more specifically, the exchange networks of PhDs between institutions.

Dans cet article, le “capital social” (qui peut être grossièrement défini comme l’ensemble des ressources dérivant de l’appartenance à un réseau) est un des éléments qui permettent de comprendre le prestige d’un département universitaire.

Dans un article tout récent de la Revue Française de Sociologie (qui — le croyez vous? — n’a aucun site sur internet), Olivier Godechot et Nicolas Mariot explorent un des versants français du même problème, dans un article intitulé “Les deux formes du capital social: Structure relationnelle des jurys de thèse et recrutement en science politique”.
L’article se penche plus précisément sur la constitution des jurys de thèses en science politique et leur impact sur le recrutement des candidats aux postes académiques. La perspective générale de l’article s’éloigne de travaux qui, globalement, se plaçaient dans un cadre de sociologie des sciences (d’où la prise en compte du “prestige”) pour se placer dans un cadre de sociologie économique : un poste au CNRS ou à l’université est alors un “bien rare”.
Le jury de thèse a ceci d’intéressant qu’il matérialise, à un moment donné, un réseau dont les relations sont orientées (A invite B au jury), parfois répétitives (A peut inviter B à plusieurs reprises dans le temps). La soutenance de la thèse est l’étape qui permet le recrutement à la plupart des postes d’enseignant-chercheur ou de chercheur.

Ils concluent

L’examen de l’incidence des relations d’invitation (à un jury de thèse) sur la probabilité d’obtention de postes confirme l’existence de deux mécanismes relationnels, analytiquement distinguables, qui peuvent fonctionner au service de l’obtention de biens rares:

  • d’une part, la diversification à l’intérieur du groupe permet à l’échelle individuelle de gagner les doubles avantages, stratégiques et informationnels de la non-redondance,
  • d’autre part, la cohésion et la densité du groupe permettent au groupe d’exister, de limiter la concurrence en son sein et de se mobiliser contre les autres groupes pour l’obtention d’avantages pour ses propres membres.

La deuxième partie de la conclusion (sur la cohésion et la densité) traite de ce qui est couramment appelé le “localisme” (le recrutement dans un département d’une personne qui a effectué sa thèse dans ce département), dont Godechot et Mariot donne une mesure possible.
Si l’article de la RFS est absent d’internet, des versions préparatoires de l’article sont disponibles (ici, résumé, au format PDF dans le Bulletin de la Fédération Paris-Jourdan, ou ici, version longue, en PDF.

[yarpp]