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Antimanuel d’éducation monkienne

Billet publié le 31/08/2005

Quelques remarques au sujet d’un ouvrage récent…
MonkDans l’une des meilleures séries américaines du moment, je veux parler de Monk, le détective agoraphobe éponyme, claustrophobe, poussière-phobe et maniaque de l’ordre résoud les énigmes les plus invraisemblables avec l’aide d’une assistante dénuée apparemment de toute phobie. voir cet extrait de Monk au format Quicktime .mov
Dans l’un des meilleurs livres du moment, l’Antimanuel d’éducation sexuelle de Iacub et Maniglier, une équipe similaire à certains égards propose un parcours dans le droit sexuel contemporain, même si l’on a affaire à deux Monk dont l’amour de la cohérence cache une phobie de la noncongruence, aucune assistante n’est là.
Pensez : un philosophe et une juriste ! La juriste ne cesse de traquer les conséquences illogiques de certaines décisions de justice et le philosophe celles de certains systèmes d’idées. Ce qui en fait un très bon livre, mais un livre de/pour maniaques.
Pour prendre un exemple : dans un épisode récent de Monk, le détective, arrivé sur les lieux d’un crime, entreprend de replacer parallèlement l’une aux autres les scellés temporaires que la police a placé, un peu n’importe comment. Dans certains passages de l’Antimanuel, l’on apprend par exemple que la majorité sexuelle — dès 15 ans — n’en est pas vraiment une car tout ce qui est permis entre adultes consentants ne l’est pas avec une (trop) jeune fille. La question des “droits sexuels” est la plus intéressante : si le droit de dire non à une relation sexuelle est bien protégé, celui de dire oui l’est beaucoup moins : jamais l’on ne peut attaquer en justice la personne (parent, amant…) qui souhaite nous empêcher d’avoir une relation sexuelle avec la personne de notre choix, et cet empêcheur de tourner en rond n’est pas vu comme un maniaque sexuel, un pervers ou un malade.
Le dernier chapitre propose [l’établissement d’]une cité utopique, dont le droit de la post-sexualité serait entièrement logique, la pure application de principes faisant du sexuel un domaine indifférent.
C’est un des éléments qui m’a le plus étonné à la lecture — qui précède ce livre — d’articles de juristes : ils font comme si “le législateur”, “la doctrine”, “le juge” existait réellement et devait produire des discours cohérents entre eux… alors que la combinaison, variable dans le temps, des intérêts des individus ne peut que produire des combinaisons variables. Jamais l’origine sociale, le niveau de diplôme, le sexe, la situation matrimoniale, l’âge du “juge” ou des députés n’entre en ligne de compte et leur production — du droit — vaut pour elle-même. Dans l’ouvrage de Iacub et Maniglier, aucun mouvement social n’existe : une des seules mentions d’une association, à la fin, est pour souligner qu’elle n’exista pas bien longtemps… (p.310)
On trouve un compte-rendu beaucoup plus développé chez Hecate, histoire d’une vie de lecteur et une forme d’illustration sur le blogroll des Perles du chat.

[yarpp]