Sexualité, politique et religion
Une des choses qui m’avaient surprises, lors de mon long séjour à New York, était l’omniprésence des publicités pour diverses églises (et synagogues) dans la presse gaie locale. Gay City News et le New York Blade (ce dernier moins fréquemment) avaient, chaque semaine, environ une page de publicité à caractère religieux. Mes séjours plus courts à Boston, Philadelphie, Chicago et Washington — et la lecture consciencieuse des informations LGBT locales m’ont convaincu qu’il ne s’agissait pas du tout d’un particularisme newyorkais. Religion et homosexualité n’étaient pas nécessairement contradictoires, gays et lesbiennes semblaient même, en partie, recherchés en tant que public ou fidèles potentiels.
Cette première image, par exemple, provient d’un des magazines gay de Chicago (le Windy City News ou le Chicago Free Press, je n’ai pas les références sous la main). Elle est destinée aux éventuels gay (lesbiennes bi ou trans) juifs à la recherche d’un lieu de prière… mais aussi d’un soutien communautaire. L’identité ici est presque plus ethnique que religieuse. Ce sont les “families” qui sont au coeur de l’action : la “communauté LGBT” n’est pas constituée que d’individus.
A New York, St Mark’s Church est présente dans le Gay City News chaque semaine ou presque, sans toujours centrer ses publicités sur des références à l’identité gaie. Ici, dans une publicité de début janvier 2007, c’est même le Kwanzaa, le Noël noir américain, qui est mis en avant. L’Eglise épiscopale, à laquelle se rattache St Mark’s, est l’une des principales dénominations bourgeoises américaines : une dénomination presque aristocratique dans son recrutement social. Sa petite taille (quelques 2 millions de fidèles) cache une influence sociale plus importante (au travers, notamment, de sa richesse immobilière, des hommes et femmes politiques qui s’en réclament, ou des séminaires et instituts théologiques qui y appartiennent). En 2003, un prêtre gay — et hétéro-divorcé — a été élu évêque.
A Washington, je me suis amusé à la lecture de cette publicité pour Inner Light Ministries (slogan : “I see GOD in you”). Grande métropole noire, D.C. compte visiblement au moins une église gaie noire afro-centrée : l’évêque Cheeks (dont on nous signale que c’est l’anniversaire, et que cette fête sera religieuse) se prénomme Kwabena et est paré d’atours Afro. “Inner Light Ministries” ne semble pas posséder de frontières théologiques précises : c’est un « Omnifaith outreach ministry dedicated to spiritual transformation » nous dit le site internet. Assemblée précaire, elle ne semble plus exister en 2007.
Voici donc trois exemples, rapides, trois vignettes cherchant à montrer combien, pour une partie du protestantisme, du judaïsme et du “new age” (comment mieux décrire Inner Light ?), certaines formes d’homosexualité on été « dépeccabilisées ».
Les églises ne sont pas les seules institutions sociales à s’afficher dans la presse homosexuelle. Chaque année, fin juin pour la Gay Pride, et vers Noël, les femmes et hommes politiques locaux achètent des encarts publicitaires : “Joyeuses fêtes et Bonne année” nous disent ensemble (ils se sont côtisés) Tom Duane et ses collègues. Le NYPD, la police municipale (mais pas l’armée !), est aussi une acheteuse fréquente d’espaces publicitaires, en période de recrutement.
Les perméabilités sont grandes entre institutions à vocation “universaliste” (police, représentation politique, voire églises dans une moindre mesure) et celles dont la vocation apparaît à première vue comme particulariste. Nombre de Français tireraient à propos de ces exemples l’alarme du “communautarisme” (certains groupes constituent même cette dénonciation en fonds de commerce)… je les laisse crier au loup.
1 commentaire
Un commentaire par Justine (02/05/2007 à 17:03)
J’ai cherché a me renseigner sur le sujet Politique et religion et je ombe ici. Cet article et très interessant, si vous en voulez un qui touche plutot l’actu . Allez ici .
http://www.elle.fr/elle/societe/chronique-du-jour/marie-francoise-colombani/ainsi-soit-la-politique
C’est pas mal comme billet