Vente par correspondance et vibromasseurs
La mise en série est une bonne technique d’objectivation. Vous avez une intuition en voyant une chose, une idée vous turlupine… essayez donc de constituer une série : vous formerez ainsi une connaissance séparée de la perception subjective que vous aviez.
Constituer des séries est souvent ennuyeux : c’est amusant au début, et ça lasse rapidement. Echantillonnez alors.
Voici comment les vibromasseurs ont été vendus par deux catalogues de vente par correspondance entre le début des années 70 et les années 2000 (Soit dit en passant, les premières ventes semblent commencer en 1967). Les images ne sont pas très jolies, mais elles sont suffisantes pour mon propos, qui est ici simple : la diffusion sociale des vibromasseurs (la “démocratisation” ?) a commencé il y a une bonne trentaine d’années. C’est à dire avant leur ré-invention comme objets à la mode.
“La Redoute, 1967” : 5 accessoires pour différents usages…
“La Redoute, 1975” : pour le massage du corps et du cuir chevelu
“La redoute, 1985-1986” : procure une sensation de bien-être
“Trois suisses, 1986, printemps” : active la circulation et tonifie les muscles
“La Redoute, 1994” : action décongestionnante et augmentation de la dilatation des vaisseaux sanguins
“trois suisses, milieu des années 1990” : à intensité variable, ils stimulent et tonifient
“trois suisses, 2000 printemps”
“La Redoute, 2001” : peu de texte, mais un objet mystérieux est présent, nommé “6 – Pour homme (non photographié)”…
En 2008, ces objets sont vendus sur la même page que les brosses à dents électriques. Mais la catégorie a enflé : une douzaine d’objets sont proposés.
“La Redoute, 2008” : petit et sophistiqué
10 commentaires
Un commentaire par Paquette (26/11/2008 à 21:05)
Il y a une sacrée évolution entre les premiers et ceux des années 90 qui commencent à devenir phaliques.
Mais je me pose une question… Les femmes devinaient à quoi ça servait réellement où il y en avait des suffisamment naïves pour penser que ça servait pour le visage et les cheveux?
Je suis trop jeune pour avoir connu cette époque où l’on cachait le plaisir féminin.
Un commentaire par Baptiste Coulmont (26/11/2008 à 21:53)
> Paquette : le camouflage était transparent. Si ces objets avaient servi réellement au visage, les notices auraient précisé que c’était pour telle ou telle chose (ride, double menton…). Mais le camouflage était nécessaire pour pouvoir les vendre sans être accusé d’outrage aux bonnes moeurs.
Un commentaire par Nicolas (27/11/2008 à 11:15)
Personnellement je ne pense pas que tous ces objets sont prévus pour un plaisir sexuel: ne faudrait-il pas être maso pour imaginer s’appliquer sur le sexe les embouts piquants des années 1975 et 1985-86, par exemple, et surtout pour les mettre en marche ? (on serait plus proche de la charcuterie que de la masturbation, me semble-t-il)
Ce qui me gène c’est que vous preniez pour acquis que tous ces objets ne servent qu’à une seule chose sous couvert de servir à autre chose. En êtes-vous sûr ? Je pense que pour certains, ils servent vraiment à autre chose.
En revanche, je vois un resserrement sémantique de l’expression “vibro-masseur”, qui à l’origine désigne un objet servant à masser par l’usage de vibration (et pourquoi pas ?) pour finalement désigner les objets très clairement phalliques et dont l’usage est alors sans ambiguïté.
Une transition a lieu en 2001, à une époque où ces objets ne sont pas encore à la mode : leur usage ne fait pas de doute, et le terme de vibro-masseur est employé, car il reste à l’époque assez “technique”. En 2008, où tout le monde sait ce qu’est un “vibro”, vous remarquerez que le terme, du coup, n’est plus employé, car trop directement sexuel, mais remplacé par des choses plus allusives (masseurs, mini-masseurs, pourtant sans équivoque dans la rubrique “intimité”)
Nicolas, un fidèle de votre blog
Un commentaire par Baptiste Coulmont (28/11/2008 à 17:16)
> Nicolas : il existe d’autres embouts que les piques. Parfois même l’on trouve des embouts dont la seule description est la suivante : “doigt”. Exemple : “Trois suisses”, 1967, p.84-85 : “Le vibromaseur électrique Calor (…) tonifie l’organisme. 3 concurseurs (sic) à boules ventouses, à doigts et à brosse”
Et de plus, l’on trouve dès la même époque des articles de journaux qui font de gros clins d’oeil au camouflage et des affaires judiciaires dans lesquelles ces objets sont saisis par la police (quand le camouflage n’est pas présent et que leur usage en vue de l’orgasme est présenté). Dans les journaux populaires (Détective, France Dimanche) quand il des publicités pour des vibromasseurs, elles sont placées à côté des publicités pour des poupées gonflables… et c’est précisé : “envoi sous pli discret”)
Donc : je surinterprête peut-être, mais j’y suis amené par d’autres éléments.
Un commentaire par Nicolas (28/11/2008 à 20:32)
Merci pour ces précisions, et tout le contexte, convaincants en effet. Mais alors je me demande, compte tenu du camouflage relatif de l’utilité de ces objets dans les catalogues grand public, quelle proportion de femme la comprenaient réellement ? Moi je ne sais pas si j’aurais compris :) Et je sais que ma mère, il y a 15 ans, avait acheté l’un de ces objets avec pour ambition réelle (si si !) de se masser (même que je l’utilisais aussi). Il s’agissait du Babyliss avec la multitude de petits bouts de plastiques bougeant dans tous les sens.
Nicolas
Un commentaire par Baptiste Coulmont (28/11/2008 à 20:41)
Le Babyliss (représenté sur une des photos plus haut) : je pense aussi que c’est un véritable masseur à bourrelets, et pas un masturbateur.
Un commentaire par La revue de web de Jean (le) Rat … : du 31/08/08 au 29/11/08 | T'as le bonjour de Jean Rat ! (29/11/2008 à 23:07)
[…] Vente par correspondance et vibromasseurs – […]
Un commentaire par valerio (07/12/2008 à 0:18)
Rien vu dans le catalogue CAMIF? Après, on s’étonne de certaines faillites!
Sinon, quel progrès en 40 ans! Ça donne un peu d’espoir pour l’évolution du reste du monde.
Un commentaire par Baptiste Coulmont (07/12/2008 à 10:18)
> Valerio : rien dans la CAMIF en effet (mais je n’ai consulté que quelques années)
Un commentaire par Quel est l’Histoire du Vibromasseur ? (09/10/2012 à 12:23)
[…] revendications féministes et de libération sexuelle. Ils apparaissent alors petit à petit dans les magazines de vente par correspondance telles que La Redoute ou Les 3 Suisses sous la forme le plus souvent de ‘’masseurs’’ sans […]