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Pour la modestie, je ne crains personne

Billet publié le 20/03/2010

Il y a quelques semaines, j’ai abordé ici même la question de la gestion des “primes d’excellence” à l’université Paris 8 : réservées aux professeurs, sans que l’on connaisse les heureux bénéficiaires des 6400€.
Mon université ne donnant même pas accès au classement individuel, j’ai du écrire à une sous direction du ministère pour avoir accès à mon évaluation. La voici :

Vous constaterez l’anonymat de l’évaluation (je ne sais pas qui a étudié mon dossier) et la précision des critères utilisés.
J’ai apparemment une production de qualité [Merci !], et un rayonnement moyen [je pensais avoir un “rayonnement” un peu plus important : il faudra que je pense à donner à mes évaluateurs d’autres indicateurs que ceux que j’avais placés dans le CV et probablement que j’arrête de refuser les invitations aux colloques, j’ai beaucoup trop pris l’habitude de dire non…].
Maintenant, il faut que j’encadre des thèses et que je dise que je suis chef d’un truc : ça va être un peu difficile pour cette session (il faut rendre les dossiers de demande de prime d’ici quelques jours), mais pour l’année prochaine, pas de problème, j’aurai “renforcé mes responsabilités scientifiques”. [Les amateurs de grammaire française auront remarqué la faute qui figure dans le texte des évaluateurs : il aurait fallu accorder le participe passé “renforcé” à “l’encadrement et les responsabilités” et pas seulement à “les responsabilités”. Mais passons, c’est certainement un usage particulier du féminin neutre. Les puristes, même, se diront que “il en résulte un avis global sur votre dossier en C” n’est pas plus correct.]
Le problème qui se pose, cependant, c’est que « chaque comité d’expertise fixe des conditions minimales requises » (conditions qui, pour la section 19 du CNU, ne sont pas rendues publiques) et que ces conditions sont « susceptibles d’être reconsidérées chaque année »… Ce qui me laisse dans l’incertitude relativement à la stratégie à suivre pour aboutir aux 6400€.
P.S. : la citation de titre est, bien évidemment, de Alphonse Allais. Je l’ai trouvée, par hasard, dans le n°3 du Tigre.

[yarpp]

10 commentaires

Un commentaire par dorant (20/03/2010 à 18:26)

En fait, le “comité d’expertise” pour les PES, s’il retient les critères fixés par la section 19, n’en est pas directement issu : il comprend également des extérieurs nommés par le ministère en raison de leurs compétences. Quant à ces critères, ils doivent être publics…et l’université d’affectation doit communiquer les évaluations aux candidats. Il y aurait peut-être là matière à recours?
Il y a également un plafond national qui donne 20 % de A, 30 % de B et 50% de C par discipline. Les modulations par université sont bien sûr importantes.
Baptiste, outre d’autres motifs, vous devriez vous syndiquer : vous auriez accès à ces informations et bien plus sans doute.

Un commentaire par Régis (21/03/2010 à 1:48)

Salut, Bapiste, je crois que ta production pourrait être améliorée ( revues d’IF supérieur, plus de PQ oriiginaux, moi, si tu veux, je te proposes de travailler sur un champ commun qui déboucherait sur ton HDR sans pb, biscotte transdisciplinarité. Les revues médicales ont un IF assez fort;être 2ème auteur (comme patron de la biostatistique est un honneur….)
Quand tu veux. Je travaille à pas mal de sujets de sciences humaines, et je suis asssailli de coups de bigophone.

Un commentaire par DM (21/03/2010 à 9:42)

Le reproche sur le faible encadrement doctoral me fait un peu rire jaune.

1) Il est très difficile de trouver des thésards de nos jours, du moins dans certaines disciplines (j’ignore si c’est le cas en sociologie).

2) En théorie, on n’a pas le droit d’encadrer un thésard avant l’HDR, et en pratique dans beaucoup d’endroits on ne peut obtenir l’HDR qu’après avoir encadré des thésards, ce qui veut souvent dire qu’on s’accorde avec un professeur pour co-encadrer. Au passage, donc, les professeurs concernés ont un excellent taux d’encadrement. Ceci renforce le mandarinat.

3) Ces mesures du nombre de thésards encadrés ne tiennent pas compte de la qualité de l’encadrement. Il est de notoriété publique que dans certains endroits, certaines disciplines (notamment SHS), les encadrants font fort peu d’encadrement effectif — à tel point que certaines universités ont institué des “pré-soutenances” pour éviter des surprises au moment de la vraie soutenance.

4) En ce qui concerne les colloques, je te renvoie au texte de Paul Caspi:
http://perso.numericable.fr/bgrardca/TEXTES/recherche.pdf

Un commentaire par Baptiste Coulmont (21/03/2010 à 10:02)

>DM : ma note “C” concernant l’encadrement doctoral m’a aussi fait rire jaune… Pour les mêmes raisons.

Un commentaire par dorant (21/03/2010 à 10:14)

Les textes sur la réforme des études doctorales (7 août 2006) permettent l’encadrement par les MCF non HDR, soit dans le cadre des comités de thèse soit dans le co-encadrement avec un HDR.
Ces mesures sont appliquées dans les disciplines scientifiques avec des calculs de pourcentages. Ce qui explique que des non HDR en nombre non marginal aient pu en bénéficier de cette prime. Dans mon université c’est 1/4 des non HDR en sciences qui ont accédé à cette prime. Et ils ont eu pour deux d’entre eux un A en encadrement doctoral.
La situation en L-SHS est bien sûr différente – cf DM – mais les écoles doctorales peuvent imposer un nombre maximal de thésards par directeur, ce qui aboutit à redistribuer et à développer les encadrements collectifs. Dans mon ED SHS, le nombre maximal est de 8.
Ce ne sont pas tant les textes qui bloquent que le conservatisme étroit de certains lobbies universitaires SHS. Et les habitudes.

Un commentaire par Régis (21/03/2010 à 10:46)

Drôle de façon de faire une moyenne… ce serait plutôt une médiane tirée vers le bas du marais par le diable “qui a le bras long” comme l’écrit Barbey d’Aurevilly dans un Prêtre marié.
Manifestement si tu veux être primé il te faut passer ton HDR, accueillir des thésards (mais est-ce vraiment ton rôle de MC? )
Conclusion: ce questionnaire est une vaselinade pour PU cherchant à changer de classe mais pas pour des jeunes souhaitant se faire un peu de gratte.
Te syndiquer ne servira de rien car tu trouveras dans les syndicalistes des gens que ce mode de classement a servi. Mieux vaut écrire ou faire écrire à Valérie Pécresse…

Un commentaire par Baptiste Coulmont (21/03/2010 à 11:55)

>Dorant : j’y ai pensé, à prendre en thèse des étudiants en passant par ces procédures dérogatoires. Pour l’instant, j’ai redirigé les quelques demandes qui m’ont été adressées vers des collègues professeurs.

Un commentaire par DM (23/03/2010 à 9:26)

@Baptiste: Au moins reçois-tu des demandes, dans d’autres disciplines il est difficile de trouver des thésards même quand on a déjà le financement. Le conseil des évaluateurs est de chercher à l’étranger (Inde? Chine? Europe de l’Est?).

Un commentaire par Eliane Daphy (06/05/2010 à 12:03)

N’oublie pas de rajouter dans ton “rayonnement” le nombre de tes téléchargements de tes dépôts en archives ouvertes sur HAL. En précisant : auto-contributeur (“true” auto-archivage). Comme la CPU a clamé qu’elle signait l’Appel de Berlin pour promouvoir le libre accès, ça devrait compter dans le “rayonnement” (ne pas oublier l’écran total et la Biafine).

Pour les thèses, sans HDR, il existe la solution de “co-direction”. Système peu pratiqué en SHS, mais ça pourrait changer. Deux modèles : 1) le directeur de thèse fait faire tout le boulot d’encadrement par le co-directeur (“voyou primé”) ; le directeur de thèse apprend le boulot d’encadrement à son co-directeur (“bonnes pratiques”). Il me manque pas de doctorants à la ramasse en sociologie – parmi les thésards des courageux directeurs qui se dévouent à encadrer 70 doctorants. Comme le ration doctorants inscrits/thèses soutenues commence à compter pour l’attribution de la PES, les grands mandarins vont probablement être heureux de trouver des braves MDC qui vont faire sortir de l’impasse leurs doctorants (dont ces pauvres professeurs overbookés n’ont pas le temps de s’occuper). Excellente source : fichier des thèses.

Un commentaire par Baptiste Coulmont » Ma prime d’excellence scientifique (23/01/2013 à 19:22)

[…] Il m’a fallu envoyer trois demandes par mail pour obtenir le rapport non-signé et non-rédigé par « l’instance nationale ». “Instance nationale” composée, pour la section 19, des éminents collègues dont les noms suivent : 19 Madame Delcroix Catherine, Université de Strasbourg 19 Madame Dion Michèle Université de Bourgogne 19 Monsieur Pequignot Bruno Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle 19 Monsieur Valade Bernard Université Paris 5 Descartes [Cette liste, c'est de l'excellence en barre.] (source) Mes notes sont ainsi : j’ai “C” en “G” (G = note globale). Définitivement pas excellent. Zut. J’ai “A” en “P” : ça doit être bien, ça. Mais c’est mitigé par un “C” en “E” (c’est à dire l’encadrement doctoral scientifique) : en effet, comme je n’encadre pas de thèse (et que je ne peux pas en encadrer), je suis classé “C”… et c’est la prime qui s’envole. J’ai “B” en “R” : un “Rayonnement” moyen donc. Et, honte parmi les hontes, j’ai “C” en “S” (“S” étant l’acronyme de “Responsabilité scientifique”). Les spécialistes en coulmontologie (et ils sont nombreux) se souviendront que j’avais obtenu les mêmes notes en 2009. […]