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Les billets de February, 2011 (ordre chronologique)

Aaah, Paris 8…

Dans le collimateur présente cette photo d’un tout nouveau panneau d’indication installé à Paris 8 cette semaine :

et écrit :

À l’Université Paris 8, il y a des portes qui ne ferment plus, des radiateurs qui ne marchent pas, des toilettes qui ne sont pas éclairées, des ordinateurs qui ont perdu leur souris, des placards qui ne servent à rien et un système de saisie des notes qui causerait, dit-on, quelques soucis aux secrétaires (contraints d’afficher les notes comme les résultats du bac, nan mais où va le monde, je vous le demande).

Comment ça, des problèmes de notes ? Pouvez-vous m’expliquer ?
Il semble, en effet, que l’installation d’un nouveau système de gestion des cours et des étudiants, “Apogée”, pose de nombreux problèmes. Par exemple, des étudiants d’une autre discipline que la sociologie ont pu recevoir ceci :

Peut-on en savoir plus ? Oui. Une note du Conseil des études et de la vie universitaire vient nous préciser les choses.

A ce jour, sur les 170 versions d’étape (VET) modélisées au niveau administratif, les deux tiers sont modélisés au niveau pédagogique, saisie et structurés. Un peu plus de la moitié ont des inscriptions pédagogiques et un tiers sont en phase opérationnelle. Le projet a donc bien avancé, mais force est de constater que nous avons pris du retard. […]
A l’heure actuelle, on peut estimer que la saisie des notes sera possible sur un peu plus de la moitié des VET mais seuls un ou deux diplômes seront en mesure de préparer leur jury à l’aide du logiciel faute, pour les autres, d’avoir récupérer (sic) l’historique des résultats. L’état d’avancement du travail laisse cependant espérer que la préparation et la tenue des jurys à l’aide du logiciel sera possible d’ici la fin du second semestre. Ce n’est donc pas le moment de baisser les bras.

Je comprends qu’il ne faut pas baisser les bras. Mais pour faire quoi ? Ce texte est très étrange, parlant de modélisation administrative et autres phases opérationnelles. Heureusement, on nous traduit quand même les choses. Des informations comme la suivante circulent :

Une lettre du vice-président du CEVU, JM Meunier, nous enjoint, étant donné le foutoir total (c’est dit dans un langage plus poli et
administratif) et que la plupart des composantes ne peuvent matériellement
pas tenir de jury, de se contenter d’afficher les notes sur un panneau
d’information.

Donc maintenant, à Paris 8, en plus des salles non chauffées, des toilettes qui fuient et autres inconvénients matériels, nous n’avons plus de suivi informatique des évaluations pédagogiques. Ou plutôt, ce suivi n’est pas encore entré dans sa phase opérationnelle.

Mais on a de beaux panneaux lumineux, style “sex shop”.

Être visible

Je suis, entre autres activités administratives, le “webmaster” du site du Département de sociologie de l’université Paris 8. Depuis sa création, vers 2005, j’ai essayé de le rendre vivant : on y trouve par exemple des compte-rendus des séjours Erasmus des étudiantes, des informations concernant les publications diverses des collègues (dans Le Monde ou ailleurs) des interviews dans Sud Ouest etc… C’est un site “mixte”, au sens où il présente à la fois le département de socio pour l’extérieur (publications, présentation des collègues) et pour l’intérieur (surtout pour les étudiants). Il y a donc des informations sur les problèmes liés au passage à Apogée et sur les recrutements, auditions, classements aux différents postes (ATER, Prag, MCF et PR) ouverts en sociologie à P8. C’est, je pense, ce qui en fait la complexité.
Mais qu’il soit “vivant” (et avoir utilisé wordpress), c’est peut-être la raison pour laquelle, si vous tapez « sociologie paris » dans google, ce résultat intriguant s’affiche :

Avez-vous, chez vous ou au travail, le même résultat ?
Et, suivant les jours, les heures, les lieux et les “cookies”, taper “sociologie” tout simplement amènera le Département de sociologie au 3e, 4e ou 5e rang :

Les résultats sont un peu moins bons pour des recherche portant sur « licence sociologie » (peut-être parce qu’on l’appelle Licence de sociologie), et encore moins sur le master de sociologie.
Et pour ce qui est des statistiques de visite ? Voici une courbe amusante :

C’est une moyenne mobile, qui prend en compte des visites quotidiennes, depuis 2006. Les points roses montrent la chute des visites au cours des mois d’été, les points bleus les chutes au moment des vacances d’hiver. Les pics sont soit liés aux rentrées, soit aux mouvements sociaux (et j’ai eu la flemme de repérer les mouvements CPE, LRU et autres). Les visites augmentent, année après année, ce qui me satisfait. D’autres indicateurs, comme le nombre de pages vues par utilisateur, ou le temps moyen passé sur le site… sont très stables sur 5 ans (3 pages, et environ 2 minutes).

Note : Je suis conscient que mettre en avant ces formes d’objectivation sans raison participe indirectement à la course à l’évaluation fort bien décrite par Grégoire Chamayou, qui repose sur des classements, des distinctions honorifiques, des classements de classements, des sommes de citation, etc… Et ici, en multipliant les liens vers le site du département de sociologie, j’essaie, modestement, d’influencer le classement de google, qui repose, en grande partie, sur la multiplicités des liens.

Apoapside…

La mise en place du logiciel de management des étudiants et des cours, “Apogée”, à Paris 8, pose de gros problèmes. Une lettre ouverte a été envoyée au président de l’université pour lui faire part des revendications du personnel administratif et des universitaires :

Deux courriers (…) font déborder la coupe Apogée.
Passe encore que l’on nous assène que le logiciel est « absolument nécessaire » : peut-être, mais quand le débat supposé nous en convaincre a-t-il eu lieu ? Vieille pratique de gestion, on a enclenché un processus à marche forcée dont l’urgence, constamment martelée et malheureusement réelle, devient le seul élément de mobilisation des personnels.
Passe encore que l’on nous enjoigne de « ne pas baisser les bras », alors que cette rentrée n’a pu se faire que parce que les personnels l’ont portée, justement, à bout de bras. Si le sens de cette implantation n’a pas été explicité au tout-venant du personnel de l’université, le tout-venant estimait pourtant de son devoir que les étudiants puissent s’inscrire et étudier.
Mais lorsqu’on explique que les difficultés rencontrées (pardon, « ressenties » ! il ne faudrait pas laisser penser qu’elles sont réelles) sont liées à une « déstabilisation des habitudes de travail », cela devient carrément insultant pour les personnels qui ont à peine le temps de sortir le nez d’Apogée pour lire cette prose institutionnelle.
source

Un compte-rendu, celui de la réunion du 20 janvier 2011, explique les raisons des problèmes d’implantation :

(…) la mise en place [d’Apogée] suit un processus itératif non séquentiel qui nécessite de la part de la cellule apogée un travail plus important que ce qui peut être perçu dans les composantes et crée nécessairement des phases de mises en attente des demandes de ces dernières.
[je souligne, mais je n’invente pas.]

Et un schéma vient nous expliquer les raisons de l’itération non séquentielle :

Et c’est vrai qu’à la lecture de ce schéma, on comprend tout.
Un petit malin s’est amusé à améliorer ce schéma :

[L’illisibilité est, je pense, voulue.]

Heureusement que, pour l’instant, les problèmes d’Apogée n’empêchent pas l’université de tourner. Au moins — à la différence des problèmes d’hygiène — Apogée ne donne pas la gastro.

L’imagination sociologique

Depuis quelques années, les “autorités de tutelle”, mais principalement le ministère de la recherche, poussent à réduire le nombre de centre de recherche, en les fusionnant. Cela donne, en sciences sociales, de grosses structures dont la cohérence scientifique n’est pas toujours évidente. Cela se fait parfois dans la joie, comme le décrit, à Lyon, Pierre Mercklé. Parfois dans la souffrance.
Mais cela donne lieu à la recherche de nouveau nom, aptes à nommer ces nouvelles structures. Quel nom ont ces (plus ou moins) nouvelles structures de recherche sociologique :
Centre Max Weber (Lyon)
Centre Maurice Halbwachs (Paris – ENS)
Centre Pierre Naville (Evry)
Laboratoire Georges Friedmann (Paris – Paris 1)
Institut Marcel Mauss (Paris – EHESS)
Centre Emile Durkheim (Bordeaux)
Centre François Simiand (Paris – EHESS)
Centre Edgar Morin (Paris – EHESS)
Centre Norbert Elias (Marseille – EHESS)
Centre Raymond Aron (Paris – EHESS)
Celles et ceux qui ont baigné, ne serait-ce qu’un peu dans les sciences sociales, ont déjà reconnu une liste de grands ancêtres. Tous morts (ou quasi, puisqu’un centre est à son nom). Tous hommes. Et tous blancs. Et je suis loin d’être le seul à avoir fait la remarque.
Même les féministes de Toulouse-2 n’ont pas trouvé de grande ancêtre : Le Centre Simone Sagesse ne fait pas référence à Mme Sagesse.
Les décès récents, ou inévitablement proches, de sociologues femmes, devraient remédier à cela. Si Madeleine Guilbert « nous a quittés, comme elle le désirait, dans la plus grande discrétion », rien n’empêche un centre à son nom. Le Centre Germaine Tillion, ça aurait aussi un peu de classe.
Merci à @SH_labo à @totoroinparis et à @nholzschuch.
[Nos collègues matheux ou physiciens sont plus imaginatifs avec le BiPop par exemple.]

Des réseaux religieux d’invitations

Les données recueillies à partir d’une collection de 150 affiches d’églises africaines sont très riches. J’ai déjà montré ici qu’on pouvait y déceler des indications d’implantation géographique, ou une “politique du titre” qui manifeste l’existence d’une hiérarchisation poussée.
Ces affiches donnent aussi des informations “réticulaires” : les pasteurs pentecôtistes passant une partie de leur temps à s’inviter les uns les autres, à pratiquer le “partage de la chaire”, un réseau apparaît. Voici une représentation graphique de ce réseau d’invitations. Vous remarquerez, en plissant les yeux, une grosse composante et de nombreuses petits groupes. Le nombre de composantes est de 60.
La question que je me pose est : mais comment donc un tel réseau est généré ? Est-ce qu’il peut être simplement déduit de certaines contraintes ?
Pour commencer à apporter une réponse, j’ai demandé à R de générer des réseaux aléatoires qui respectent 2 contraintes.

  • 1/ si dans le réseau observé l’individu (i) participe à (n) événements, il en va de même dans le réseau généré
  • 2/ si dans le réseau observé l’événement (j) a réuni (m) personnes, il en va de même dans le réseau généré

Les réseaux générés “aléatoirement et sous contraintes” ont une particularité : leur nombre moyen de composantes n’est pas proche de 60, il est proche de 41. Les réseaux “aléatoires” relient beaucoup plus les individus (alors que chaque individu participe au même nombre d’événements et que chaque événement réuni le même nombre de personnes, par comparaison avec le réseau observé).
Mes pasteurs pentecôtistes noirs, donc, semblent ne pas “inviter au hasard”, mais choisir une “distance” moindre que les “pasteurs aléatoires”. De ce fait, ils créent un monde un peu plus “troué” que celui du modèle.
Note : Je ne sais pas si je dois vraiment mettre cela en ligne. En effet, je ne maîtrise pas totalement ce dont je parle et j’ai peut-être fait n’importe quoi… J’expose donc maintenant la méthode utilisée. Je démarre d’une matrice d’adjacence, nommée “mat”, qui indique “qui participe à quoi” :
E1 E2 E3 E4
P1 1 0 1 0
P2 1 1 0 0
P3 0 1 0 1
P4 0 0 0 1
P5 0 0 0 1
P6 1 1 1 0

Dans laquelle E1 est l’événement n°1, P1 la personne n°1 (qui ici, participe à E1 et E3).
Dans le logiciel R, le package “vegan” dispose d’une commande :
b< -commsimulator(mat, method="quasiswap")

Methods quasiswap and backtracking are not sequential, but each call produces a matrix that is independent of previous matrices, and has the same marginal totals as the original data.

Cette commande permet de générer des matrices qui ont les mêmes marges que les matrices de départ (ce qui fait que chaque événement aura le même nombre de participants et chaque personne participera au même nombre d'événements).

Suites : Voici un synthèse du nombre de composantes après avoir généré 1000 réseaux aléatoires :

La probabilité de tomber sur un réseau à 60 composantes (avec les contraintes de départ) est donc bien faible.

Réseaux “aléatoires”, suite

J’ai essayé de comprendre un peu plus précisément les résultats du billet précédent.
Partons d’un réseau bimodal représenté, ci-dessous, sous la forme d’une matrice puis d’un graphe :

La Matrice

x1 x2 x3 x4 x5 x6 x7 x8
a 1 1 0 0 0 0 0 0
b 1 1 0 0 0 0 0 0
c 0 1 1 1 0 0 0 0
d 1 1 0 0 0 0 0 0
e 0 0 0 0 1 0 0 0
f 0 0 0 0 1 1 0 0
g 0 0 0 0 1 0 0 0
h 0 0 0 0 0 0 1 1
i 0 0 0 0 0 0 1 1

Le Graphe


On peut comprendre ce réseau comme une description d’événements (X1 à X8) auxquels participent (ou non), les personnes “a”… “i”.
Ce réseau est un peu spécifique : Le premier et le deuxième “événement” (X1 et X2) réunissent les mêmes personnes (a, b et d), la personne “c” participant au 2e événement seulement. J’observe, dans les invitations de pasteurs repérées sur les affiches pentecôtistes, le même genre de “réinvitations”.
Ce qui m’intéressait était de comparer ce réseau avec des réseaux qui auraient une structure similaire. Par “structure similaire”, j’entends “les marges des matrices sont les mêmes” : l’événement X a n participants dans le réseau de départ et dans le réseau auquel on le compare.
Un problème similaire s’est posé en “écologie quantitative” (ou écologie des communautés) : on peut imaginer que la matrice, plutôt que de représenter un réseau, représente une “communauté” (en colonne, les espèces — présentes ou non –, et en ligne, des lieux échantillonés). On en trouve, par exemple, un usage dans cet article
Partitioning of functional diversity reveals the scale and extent of trait convergence and divergence ou dans cet autre article Using biodiversity deconstruction to disentangle assembly… :

We generated 1000 random matrices by a quasi swap algorithm (Miklós & Podani, 2004) using the function ‘commsimulator’ in vegan for R (Oksanen et al., 2007). The null matrices were subsequently uploaded into a custom-coded (…)

Ce problème, sous des formes plus proches des miennes, s’est aussi posé à des sociologues travaillant sur des réseaux sociaux. Jean Finez, travaillant sur la co-participation aux comités d’administration (les liens interlocks), a tenté d’en comprendre la logique en les comparant à des réseaux aléatoires de même structure Solidarités patronales et formation des interlocks [halshs] :

nous comparons le réseau des interlocks à des réseaux générés aléatoirement de manière à mettre en évidence ses spécificités et à ne pas mésinterpréter des propriétés qui relèvent en fait des contraintes juridiques et organisationnelles. Nous avons généré 50 réseaux aléatoires bimodaux, construits de manière à posséder de nombreuses caractéristiques identiques à celles du réseau interlock. […]
Dans chaque réseau aléatoire bimodal, les conseils d’administration sont choisis par les individus par un tirage dans une loi uniforme. En outre, les réseaux ont été construits de manière à partager de nombreuses caractéristiques avec le réseau interlock de l’élite de premier ordre. Premièrement, comme dans le réseau réel, chaque réseau aléatoire est composé de 27 sommets « dirigeants » et de 40 sommets « entreprises » reliés par 91 liens dirigeants-entreprises. Deuxièmement, chaque dirigeant est présent dans 3 à 5 conseils d’administration et chacune des 40 entreprises ne peut accueillir plus de 18 dirigeants.

J’ai donc utilisé, dans le package “vegan”, l’instruction commsimulator (méthode “quasi swap”), qui génère une matrice aléatoire respectant les marges de la matrice de départ.

Souvent, l’instruction va donner quelque chose de ce genre : Il n’y a plus que 2 composantes (par rapport au réseau de départ, il y a moins de “ré-invitations”.)
Si l’on génère 10 000 réseaux, l’histogramme du nombre de composantes est celui-ci :

A quelques 500 reprises, des réseaux à 3 composantes apparaissent. Et, surprise, à 3 reprises, des réseaux à 4 composantes (très rares, donc, dans cette configuration).
Voici ce réseau à 4 composantes respectant les contraintes de départ :

Dans cet exemple, les “ré-invitations” sont maximales.

Un peu de sociologie électorale

Je n’avais qu’une heure, alors c’est fait à l’arrache.
Voici la “couleur” politique de votre bureau de vote, si vous votez à Paris :

Les données proviennent de Paris “Open Data” et décrivent les résultats du premier tour des régionales de 2010. Je me suis inspiré de Mounir&Simon mais j’ai fait une petite classification ascendante pour distinguer des “clusters” (ils ne distinguaient que Droite / Gauche et cela me semblait un peu trop simple).


Groupe 1 : noir : une zone frontière (mais où Pécresse fait le double de Huchon)
Groupe 2 : rouge : ce doit être une ancienne zone à droite, passée à gauche. Huchon et Duflot, ensemble, sont bien au dessus de Pécresse.
Groupe 3 : vert : C’est là où la candidate verte, Duflot, fait son score maximal et talonne Huchon. Le PC est aussi en “force”.
Groupe 4 : bleu foncé : LA zone Pécresse : là, on vote à droite en majorité.
Groupe 5 : bleu clair : la zone des marges, où le score de Pécresse est faible, et où les petits candidats (Arnautu, Besancenot, Governatori, Kanoute, Laurent, Mercier…) font un score plus important qu’ailleurs.

Mise à jour, avec de nouvelles couleurs.
Les groupes sont construits de la même manière que ci-dessus, mais le “barplot”, sous la carte, insiste sur les “petits” candidats, en insistant sur la déviation par rapport à leur moyenne sur Paris.


[Attention : c’est embrouillé. Ce n’est pas “faux”, mais le “barplot” ne représente pas les informations sur lesquelles je me suis basé pour construire les groupes.].

 
Où ont-ils (et elles) fait leur meilleur score ?

Deuxième mise à jour
Une analyse des correspondances produit ce joli graphe. L’Axe 1 explique les 3 quarts de l’inertie (et place les personnes sur un axe droite (à gauche) — gauche (à droite du dessin).
Mais l’on voit aussi l’importance du 2e axe : qui répartit les candidats de partis “hétérodoxes” : FN, NPA, Verts, etc…

Identifier des acteurs importants

Continuons l’exploration des réseaux d’invitation que l’on peut objectiver à partir des affiches d’églises “noires”, collées un peu partout en région parisienne (en réalité pas partout, mais bon…).
On peut supposer que les personnes qui, par leur présence, assurent des liens entre composantes qui seraient autrement disjointes sont “importants”. On peut identifier ces personnes comme des “cutpoints“. Je les ai coloriées dans le graphe ci-contre en vert.
Dans l’état présent de mes données, il y a 28 “cutpoints“. Et, chose amusante, sur ces 28 personnes, 7 ne sont pas des pasteurs, ni des prophètes, ni des évêques… Ce sont du “petit personnel” religieux, des détenteurs de “tous petits titres” : typiquement, “frère”, “soeur”, “servante” ou “chantre”. [Celles et ceux qui apparaissent vers la gauche de l’analyse en composante principale de ce billet]
Mais on pourrait supposer, d’une autre manière, que les acteurs les plus “importants” sont ceux qui sont connectés, directement ou indirectement, à de nombreux autres acteurs. On appelle cela la “centralité d’intermédiarité” et on peut donner un score à cette notion, à partir de l’algorithme betweenness (dans le package “sna” de R). Sûrement, là, on trouverait des pasteurs et des prophètes, les “big mens” de ce monde.
Mais mes données indiquent que, parmi les 11 personnes les plus “centrales”, 6 sont du “petit personnel” religieux. Il y a même mieux : la personne la plus centrale est un chanteur, René L***. Et cela peut se constater sur l’ensemble du graphe : si l’on calcule la “centralité par titre” (en ne gardant que 2 grosses catégories, “pasteurs” et “autres”, alors la catégorie “autres” a un score moyen de centralité plus important).
Le monde pentecôtiste est souvent décrit comme un monde d’entrepreneurs religieux indépendants (certains devenant “grands” en accumulant des fidèles). Au minimum, on voit ici à partir d’une approche de “sociologie structurale” que ces entrepreneurs s’adossent à des acteurs marginaux pour monter leur entreprise. J’appelle ces acteurs “marginaux” car ce ne sont ni des fidèles au sens strict, ni des outsiders radicaux, ni des porteurs de titres prestigieux (comme “bishop”) ni des “sans-titres”. Et je les appelle “marginaux” car, dans la quarantaine d’articles, de thèses, de livres… de sociologie et d’anthropologie portant sur ces églises, les “frères” et “soeurs” chanteurs et chanteuses n’apparaissent pas vraiment. Est-ce parce qu’ils sont vraiment anecdotiques ? Ou est-ce parce que le regard (et la problématique) de mes collègues les a invisibilisés ? [Il est facile de les invisibiliser, à partir d’une vision d’emblée “cléricale” du monde religieux, où les “grands” sont les porteurs d’un charisme personnel.]

Droite-gauche… haut-bas ?

L’axe “gauche-droite” structure une vision commune des opinions politiques. De l’extrême droite (Front national) à la droite classique (UMP), au centre (MoDem), au PS, et, à sa gauche, les Verts, le PC… et enfin, à l’extrême gauche, les corpuscules trotskistes.
Oui, mais voilà.
Si l’on produit, à partir des données “open data” publiées sur paris.fr, une analyse des correspondances [basées sur le pourcentage des votes reçus par chaque candidate dans chaque bureau de vote], on obtient ceci :
1- pour les élections régionales de 2010 :

2- pour les présidentielles de 2007 :

[Ce n’est pas très lisible : cliquez sur l’image pour obtenir les PDF]

Sur cette représentation, l’on trouve bien un axe “droite-gauche”. En 2010 comme en 2007, le premier axe (celui des abscisses) semble ordonner les candidats de l’extrême-gauche à la droite (de Besancenot à Sarkozy ou Pécresse). Mais cet axe ne résume pas toute l’information. Le deuxième axe (celui des ordonnées) nous donne d’autres informations, et c’est une sorte d’axe qui résume et oppose deux sortes d’émergences politiques. L’émergence “verte” (Duflot/Voynet) opposée à l’émergence d’extrême-gauche ou d’extrême-droite. Les “options perturbatrices” (pour les partis établis) s’écartent de la droite “y=0”.

Ce constat est assez classique [voir par exemple Pascal Perrineau , Jean Chiche , Brigitte Le Roux , Henry Rouanet L’espace politique des électeurs français à la fin des années 1990. Nouveaux et anciens clivages, hétérogénéité des électorats. Revue française de science politique Année 2000 Volume 50 Numéro 3 pp. 463-488]. Mais il m’a beaucoup amusé de voir les électeurs parisiens si “néo-paradigmatiques”.

Note : les données “open data” de paris.fr sont assez propres. Mais il me semble qu’une coquille s’était glissée dans les résultats d’un bureau de vote (une inversion du nombre de voix entre Royal, Bayrou et des petits candidats). Ce qui donnait cette première analyse des correspondances, ma foi très étrange.


J’ai donc corrigé les résultats du bureau n°548.

Quartier d’artistes anonymes


On se doute bien que, maintenant, les tagueurs ont les cheveux blancs : dessiner à la bombe sur les murs est devenue une activité du troisième âge (enfin… pour ceux qu’une vie de débauche et de refus de l’ordre public n’a pas conduit à une mort avant l’heure). Certains peuvent même avoir suivi des cours de typographie, et je soupçonne l’auteur de ce « 777 », rue de Palestine à Paris, d’avoir réfléchi au crénage et à la ligature.
Il y a eu, dans la même rue, un incendie de scooter, qui a brûlé la façade d’un immeuble, la transformant en surface cloquée et boursoufflée.
 
Cela fait plusieurs mois que l’incendie a eu lieu, et, ce matin, je me suis aperçu qu’un (ou une) peintre s’était servi(e) des phlyctènes éclatées pour y placer quelque pigment outremer, azur ou indigo. L’effet produit est intéressant, probablement parce qu’il s’appuie sur le hasard de la répartition des cratères, et parce que le bleu est sinon absent de la façade (gris-jaune ou beige).

À quelques pas de là se trouve un dispositif anti-urination classique, une sorte de grille en métal visant à empêcher les hommes de s’approcher trop près du recoin. Un petit malin (je pense que c’est un petit malin) s’est servi du mur pour y apposer un manneken pis de sa composition : une variation sur les figurines performatives, qui nous incitent quotidiennement à « traverser », à « stopper », à « entrer dans les toilettes si vous disposez du sexe adéquat », à « avertir son voisin de colis suspects » où à dénoncer à la police les enfants des immigrés clandestins. La figurine d’ordre, ici, se soulage. Il fallait bien qu’elle ait une face obscure.

Faire un comité (de sélection)

Pour un poste de maître de conférences en sociologie prochainement publié sur “Galaxie”, et qui sera renseigné sur le wiki auditions 2011, j’étais en charge de constituer, à partir des propositions des collègues, le comité de sélection.
Ce fut une tâche un peu complexe, car l’université Paris 8 ne nous a donné que très tardivement le calendrier que nous devions suivre… alors que les autres universités avaient déjà commencé à constituer leurs comités. Il fallait de plus, étant donné le profil du poste, trouver plusieurs spécialistes disponibles à certaines dates.
Voici ce que donne ma “feuille de suivi” principale :

Après avoir raturé deux noms et entouré un troisième, je me suis aperçu que j’étais en train de faire du scriptopolis en direct.

Si tu fais de la socio des orgas, t’as de la chance

Le candidat qui a le plus de chance d’être recruté à l’université en France, cette année, est celui qui fait de la sociologie de la santé dans des organisations. [sous l’hypothèse que les postes ne sont pas pour des candidats locaux].

Voici un classement thématique des postes ouverts au concours cette année, en section 19. Le nombre de postes en socio de la santé me semble étonnant : je pensais qu’il n’y avait que quelques thèses par an sur cette thématique.

Apparemment, on a besoin de sociologues du travail. On en produit pas mal, donc les postes devraient être bien remplis.
Organisation et travail

PARIS 13 SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS, SOCIOLOGIE DU TRAVAIL
PARIS 11 SOCIOLOGIE ET PSYCHOLOGIE DES ORGANISATIONS
EVRY VAL ESSONNE Sociologie du travail
REIMS Enseignement : Sociologie des organisations et des professions Recherche : Sociologie des professions
MULHOUSE Sociologie du travail
REIMS (IUT REIMS) Enseignement : Sociologie Recherche : Sociologie des organisations, des entreprises
TOULOUSE 2 SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS
AMIENS TRAVAIL et PRECARITE

Comme on le voit ci-dessous, la socio de la santé est souvent une socio du travail (de la santé au travail).
Santé

BORDEAUX 2 Sociologie de la Sante et des politiques publiques de sante – Sante, societe, politiques
NANTES Sociologie de l’entreprise, sante au travail
ANGERS Socio economie de la Sante
PARIS 5 (RENE DESCARTES) Sociologie de la sante et/ou de la sante mentale.
ROUEN Sante, organisation, travail
VERSAILLES/SAINT-QUENTIN Sante Publique, Sociologie de la sante
PARIS 13 SOCIOLOGIE DU RISQUE ET PREVENTION DES RISQUES PROFESSIONNELS

J’ai mis dans “pauvreté” ce qui correspond à l’encadrement des classes populaires, “l’intervention sociale”.
Pauvreté

PARIS 12 (PARIS-V.DE-MARNE) Intervention et politiques sociales dans le champ de l education et de la prevention
ROUEN (IUT EVREUX) Intervention sociale
POITIERS Classes et milieux sociaux. Emploi egalement ouvert au recrutement au titre du handicap.

La culture est “contemporaine”, “nouvelle” ou alors ancienne et patrimoniale. Mais il y a une belle brochette. Celle qui a travaillé sur la numérisation du patrimoine muséal et ses experts a peut-être une chance.
Culture :

CAEN Sociologie des cultures contemporaines
BESANCON Metiers de l’art et de l’exposition, museographie, museologie.
ANGERS (IUT ANGERS) Sociologie et sociologie de la culture
PARIS 1 (PANTHEON-SORBONNE) Tourisme, patrimoine, culture
AMIENS Sociologie des arts et des nouvelles technologies
LYON 2 (LUMIERE) Sociologie de la connaissance : savoirs profanes, expertises, cognitions

Il reste quelque “varia” : un seul petit poste de démographe (à P1, c’est classique, en raison de l’IDUP), 2 postes “quantis”…
Varia

RENNES 1 (IUT RENNES) Sociologie, sciences politiques
BREST (IUFM) Sociologie de l’ecole, analyse quantitative
PARIS 1 (PANTHEON-SORBONNE) Analyse demographique et statistique
PARIS 10 Sociologie urbaine quantitative
PARIS 13 SOCIOLOGIE GENERALE ET METHODOLOGIE
PARIS 8 Sociologie, genre et rapports sociaux de sexe

Je suis un partisan farouche de l’absence de profil et de profilage. S’il ne tenait qu’à moi, je transformerai tous ces profils en “sociologie” (voire “démographie”, puisqu’on se partage la discipline). Mais il ne tient pas qu’à moi.

Pour en savoir plus, rendez-vous sur le wiki auditions.

Voici un graphe, fait très rapidement, montrant (probablement) la proximité des postes entre eux…