L’imagination sociologique
Depuis quelques années, les “autorités de tutelle”, mais principalement le ministère de la recherche, poussent à réduire le nombre de centre de recherche, en les fusionnant. Cela donne, en sciences sociales, de grosses structures dont la cohérence scientifique n’est pas toujours évidente. Cela se fait parfois dans la joie, comme le décrit, à Lyon, Pierre Mercklé. Parfois dans la souffrance.
Mais cela donne lieu à la recherche de nouveau nom, aptes à nommer ces nouvelles structures. Quel nom ont ces (plus ou moins) nouvelles structures de recherche sociologique :
Centre Max Weber (Lyon)
Centre Maurice Halbwachs (Paris – ENS)
Centre Pierre Naville (Evry)
Laboratoire Georges Friedmann (Paris – Paris 1)
Institut Marcel Mauss (Paris – EHESS)
Centre Emile Durkheim (Bordeaux)
Centre François Simiand (Paris – EHESS)
Centre Edgar Morin (Paris – EHESS)
Centre Norbert Elias (Marseille – EHESS)
Centre Raymond Aron (Paris – EHESS)
Celles et ceux qui ont baigné, ne serait-ce qu’un peu dans les sciences sociales, ont déjà reconnu une liste de grands ancêtres. Tous morts (ou quasi, puisqu’un centre est à son nom). Tous hommes. Et tous blancs. Et je suis loin d’être le seul à avoir fait la remarque.
Même les féministes de Toulouse-2 n’ont pas trouvé de grande ancêtre : Le Centre Simone Sagesse ne fait pas référence à Mme Sagesse.
Les décès récents, ou inévitablement proches, de sociologues femmes, devraient remédier à cela. Si Madeleine Guilbert « nous a quittés, comme elle le désirait, dans la plus grande discrétion », rien n’empêche un centre à son nom. Le Centre Germaine Tillion, ça aurait aussi un peu de classe.
Merci à @SH_labo à @totoroinparis et à @nholzschuch.
[Nos collègues matheux ou physiciens sont plus imaginatifs avec le BiPop par exemple.]
7 commentaires
Un commentaire par N. Holzschuch (09/02/2011 à 18:51)
Note que “BiPop” fait partie du “Laboratoire Jean Kuntzmann” http://www-ljk.imag.fr/
… et que Jean Kuntzmann était, euh, également, un homme. Blanc. Et qu’il est mort. On n’en sort pas.
Un commentaire par Denys (09/02/2011 à 20:06)
Bien sévère, comme critique : on trouve quand même deux allemands dans la bande. Mais pas un américain. On ouvre les paris ? Paul Lazarsfeld ? Ah, quantitatif, c’est plus à la mode. Talcott Parsons ? Ouh, fonctionnaliste, c’est pas bien. Bon, Erving Goffman, alors.
Un commentaire par XavierM (10/02/2011 à 10:36)
Il y a bien un “non-blanc”, Abdelmalek Sayad, qui a donné son nom à un centre, mais c’est un centre… de documentation :
http://www.cdasayad.org/
A part ça, lui ‘est aussi un homme mort ;=)
Un commentaire par gizmo (11/02/2011 à 0:45)
Et que dire du nom donné aux universités françaises… Stendhal, Jules Verne, François Rabelais, Montesquieu, Montaigne, Diderot, Descartes, Lumière, Pasteur, Joseph Fourier, Jean Monnet, Robert Schuman, Charles de Gaulle, Pierre Mendes France, Blaise Pascal, Henri Poincaré, Claude Bernard et tous les Paul : Cézanne, Sabatier, Verlaine, Valéry… Une femme a une université à son nom, et encore, avec son mari…
Un commentaire par Baptiste Coulmont (11/02/2011 à 10:33)
Aaah… on ne s’en sortira pas, donc. A moins (horreur !) d’une petite incitation politique à indexer des noms de femmes sur des institutions de recherche.
Un commentaire par Régis C (14/02/2011 à 18:01)
Lyon 2 a un centre Louise Labé dont les missions incluent l’enseignement et la recherche.
Bon, l’historicité de la Belle Cordière est régulièrement contestée…
Un commentaire par DM (17/02/2011 à 19:30)
Les noms de projets INRIA sont souvent amusants… je me rappelle du projet MIAOU, par exemple!