Identifier des acteurs importants
Continuons l’exploration des réseaux d’invitation que l’on peut objectiver à partir des affiches d’églises “noires”, collées un peu partout en région parisienne (en réalité pas partout, mais bon…).
On peut supposer que les personnes qui, par leur présence, assurent des liens entre composantes qui seraient autrement disjointes sont “importants”. On peut identifier ces personnes comme des “cutpoints“. Je les ai coloriées dans le graphe ci-contre en vert.
Dans l’état présent de mes données, il y a 28 “cutpoints“. Et, chose amusante, sur ces 28 personnes, 7 ne sont pas des pasteurs, ni des prophètes, ni des évêques… Ce sont du “petit personnel” religieux, des détenteurs de “tous petits titres” : typiquement, “frère”, “soeur”, “servante” ou “chantre”. [Celles et ceux qui apparaissent vers la gauche de l’analyse en composante principale de ce billet]
Mais on pourrait supposer, d’une autre manière, que les acteurs les plus “importants” sont ceux qui sont connectés, directement ou indirectement, à de nombreux autres acteurs. On appelle cela la “centralité d’intermédiarité” et on peut donner un score à cette notion, à partir de l’algorithme betweenness (dans le package “sna” de R). Sûrement, là, on trouverait des pasteurs et des prophètes, les “big mens” de ce monde.
Mais mes données indiquent que, parmi les 11 personnes les plus “centrales”, 6 sont du “petit personnel” religieux. Il y a même mieux : la personne la plus centrale est un chanteur, René L***. Et cela peut se constater sur l’ensemble du graphe : si l’on calcule la “centralité par titre” (en ne gardant que 2 grosses catégories, “pasteurs” et “autres”, alors la catégorie “autres” a un score moyen de centralité plus important).
Le monde pentecôtiste est souvent décrit comme un monde d’entrepreneurs religieux indépendants (certains devenant “grands” en accumulant des fidèles). Au minimum, on voit ici à partir d’une approche de “sociologie structurale” que ces entrepreneurs s’adossent à des acteurs marginaux pour monter leur entreprise. J’appelle ces acteurs “marginaux” car ce ne sont ni des fidèles au sens strict, ni des outsiders radicaux, ni des porteurs de titres prestigieux (comme “bishop”) ni des “sans-titres”. Et je les appelle “marginaux” car, dans la quarantaine d’articles, de thèses, de livres… de sociologie et d’anthropologie portant sur ces églises, les “frères” et “soeurs” chanteurs et chanteuses n’apparaissent pas vraiment. Est-ce parce qu’ils sont vraiment anecdotiques ? Ou est-ce parce que le regard (et la problématique) de mes collègues les a invisibilisés ? [Il est facile de les invisibiliser, à partir d’une vision d’emblée “cléricale” du monde religieux, où les “grands” sont les porteurs d’un charisme personnel.]
2 commentaires
Un commentaire par Frédéric (23/02/2011 à 21:10)
Ce n’est pas vraiment étonnant de trouver un musicien occuper une position de “centralité” dans la mesure où les “croisades, “conventions” et autre “campagnes de miracles” sont organisées autour de “produits d’appel”, au premier rang desquels on trouve la musique. Dans mes souvenirs, une personne comme Marcel Boungou (http://www.marcelboungou.com/), figure centrale du gospel évangélique (pléonasme) français se retrouve sur pas mal d’affiches.
Un commentaire par Rubrique les blogs de Data Geeks : Baptiste Coulmont | Data Publica (05/10/2012 à 14:43)
[…] certaines relations de travail entre députés, ou les relations entre sociologues ou encore les relations entre pasteurs évangéliques noirs à Paris… J’ai d’autres surprises sous la main, mais elles n’ont pas encore été […]