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Les billets de June, 2013 (ordre chronologique)

Mobilité des enseignants-chercheurs

L’on trouve, dans les bilans statistiques publiés par la DGRH-A du ministère de l’enseignement supérieur, des informations intéressantes sur la mobilité des enseignants-chercheurs.
Pour 2011, par exemple, il est possible de voir de quelle académie et vers quelle académie ont eu lieu les mutations. Les mutations ne sont pas des changements de corps (MCF–>PR), mais des mouvements entre deux universités, mais dans le même corps. Les mutations ne sont effectives que si un département (par la voix d’un comité de sélection) accepte la candidature : il ne s’agit donc pas, à la différence des mutations dans le Secondaire, de mutations à l’ancienneté.
Le graphe suivant synthétise ces mutations. Je n’ai gardé que les mutations d’académie à académie qui apparaissaient plus d’une fois. Il faudrait cumuler les mutations sur plusieurs années pour obtenir des données plus solides. Mais on remarque déjà une ébauche de mouvements intra-région (entre Rennes et Nantes, entre Montpellier et Aix-Marseille, ou entre Lyon et Aix).
mobilite-2012
On remarque surtout l’attraction de Paris : les mouvements se font, visiblement et de manière importante, vers Paris.
Si l’on fait la somme des soldes migratoires, sur plusieurs années (2004-2011), alors on voit apparaître des académies plus recherchées que d’autres.

solde Académie
-134 Lille
-61 Nantes
-55 Nancy-Metz
-53 Rouen
-50 Rennes
-47 Amiens
-45 Orléans-Tours
-37 Reims
-36 Besançon
-29 Clermont-Ferrand
-27 Poitiers
-25 Caen
-21 Dijon
-19 Antilles-Guyane
-19 Limoges
-11 La Réunion
-10 Nice
-5 Grenoble
-4 Corse
-1 Strasbourg
1 Pacifique
17 Lyon
24 Créteil
26 Aix-Marseille
31 Toulouse
39 Bordeaux
43 Montpellier
54 Versailles
453 Paris

Ces données sont grossières : il faudrait pouvoir travailler non pas sur les académies (de taille très inégales), mais sur les universités elles-mêmes. Mais elles montrent un phénomène massif : le mouvement vers Paris.

Source des données Bilan des recrutements en 2011 : Bilan de la session « synchronisée » 2011, SECRÉTARIAT GÉNÉRAL, DIRECTION GÉNÉRALE DES RESSOURCES HUMAINES, Service des personnels enseignants de l’enseignement supérieur et de la recherche Sous direction des études de gestion prévisionnelle, statutaires et des affaires communes DGRH A1-1.

La fabrique de is the new la construction sociale de

Il me semblait bien que l’expression “la fabrique de” remplaçait, rapidement, l’expression “la construction sociale de”.
Je n’ai pas eu le courage de repérer tous les articles de sciences sociales, j’ai juste compté, sur le catalogue de la BnF, le nombre d’ouvrages portant en titre l’une de ces deux expressions :
fabrique
Et la fabrique remplaça la construction.

Liste de liens intéressants

  1. Que font les étudiants de leur logement ?, sur le site du département de sociologie de l’université Paris 8
  2. La collection complète de Clit007, revue féministe lesbienne suisse francophone du début des années 1980 (mais attention, revue suisse francophone lesbienne féministe, tendance “vanille-fraise”)
  3. Saidina devient Franck… ou le halo féminisant du -a terminal
  4. Une nouvelle revue, Statistique et société
  5. Cartographie du vernaculaire, c’est spectaculaire
  6. Je réussis en sociologie, sur “Lectures”
  7. Arrêtons les thèses de plus de 350 pages ! première partie et deuxième partie sur orgtheory
  8. Et stop aux thèses qui prennent plus de trois ans, chez David Monniaux
  9. Un franc en 1976 == 1 euro en 2013 ?… Chevênement n’a même plus besoin de demander le retour au Franc [qui, parmi mes lecteurs, se souvient du chevênementiste solitaire de l’ENS, vers 1998…]
  10. Je ne suis pas sponsorisé par le Polit-bistro : introduction à l’analyse de données avec R
  11. Introduction à l’analyse de réseau avec R
  12. Si vous aimez le jazz manouche et la sociologie critique, the place to be c’est “la java” et c’est le 22 juin.
  13. Réjouissons-nous ! On apprend ici que Le Maff’ va donner une dernière leçon en Sorbonne avant la retraite ?
  14. Le site d’Emmanuel Lazega

… et ce sera tout pour aujourd’hui.

L’accès sécurisé aux données

Jusque dans les années 1960-1970, l’accès aux données administratives était relativement facile aux sociologues. Depuis le développement des législations protégeant la vie privée des acteurs sociaux, c’est plus compliqué. Heureusement, la plupart du temps, la sociologue n’a pas besoin d’informations comme le revenu déclaré par les individus et les ménages habitant telle adresse. Mais parfois, si.
Dans ce cadre a été créé le CASD, “Centre d’accès sécurisé aux données”.

C’était l’introduction.

Depuis quelques années, je travaille à comprendre les usages sociaux du prénom. Le “Fichier des prénoms” de l’INSEE, ou de vieilles “Enquêtes Emploi” non anonymisées permettent de répliquer des résultats connus depuis les travaux de Besnard et Desplanques. Mais on en fait le tour. Ma recherche sur les changements de prénoms et la lecture de travaux sur les prénoms donnés par les migrants à leurs enfants m’a incité à diriger mes recherches vers ce thème: quels prénoms sont donnés par les migrants et leurs descendants ?
L’enquête TeO, Trajectoires et Origines, est une enquête récente. Y ont été interrogées 11 000 personnes nées en France métropolitaine et 11 000 hors de France métropolitaine. Comme il est de coutume dans les enquêtes de l’INED et de l’INSEE, les prénoms sont recueillis au départ du questionnaire, afin que les questions posées soient “Depuis combien de temps Robert est-il…” et non pas “Depuis combien de temps Individu7 est-il…”
TeO-prenoms
[extrait du questionnaire de l’enquête TeO]
Puis les prénoms sont séparés de la base de données : les chercheurs n’y ont pas accès, ils n’ont accès qu’à des identifiants numériques. Et Robert n’y pourra rien : il n’est maintenant qu’un numéro.

J’ai donc demandé, après plusieurs contacts auprès de l’INSEE et de l’INED, au Comité du Secret Statistique l’autorisation d’avoir accès aux prénoms de TeO. En décembre 2012, j’ai été auditionné par le Comité (l’audition fut très courte, le dossier avait été instruit et ne soulevait pas de problèmes particuliers). Les données seront accessibles par l’intermédiaire du “CASD”, le Centre d’accès sécurisé aux données.

Le CASD fournit un terminal (gros comme une demi-freebox) qui permet de faire des traitements statistiques sur les données, mais ne permet ni copie d’écran ni téléchargement des données : les données restent sur un serveur localisé — peut-être — dans les sous-sols de Malakoff. Le terminal ne fonctionne qu’à travers une double identification individuelle : par carte à puce et empreintes digitales. Un VPN permet d’accéder au serveur. Si le terminal, qui est dans un placard fermé dans un bureau fermé dans un lieu surveillé, est volé, le voleur ne pourra rien faire. Il lui faudrait ma carte à puce (conservée ailleurs) et mes doigts (toujours sur moi).
sdbox
Une fois les traitements statistiques effectués, les tableaux ou graphiques seront évalués par un agent du CASD, afin de vérifier qu’ils ne contiennent pas de données permettant d’identifier un individu précis.

Ce système, un peu complexe, me semble pour l’instant parfait [même si, pour des raisons liées à la configuration du réseau dans les locaux où je travaille, le VPN n’a pas encore pu être mis en place] : la nécessaire protection de la vie privée s’accompagne de la possibilité de travailler sur des données individuelles.

Portrait des recrutements universitaires

On trouve sur la partie Bilans et statistiques du Ministère de l’enseignement supérieur, un rapport qui vient d’être publié sur la Campagne de recrutement et d’affectation des maîtres de conférences et des professeurs des universités. Session 2012 [pdf]

Ce rapport, fort détaillé, nous donne toute une série d’indications sur l’état actuel des recrutements :

  1. 3062 postes ouverts en 2012 contre 3303 en 2011. Il y avait eu 3509 postes ouverts au recrutement en 2006. 2746 postes ont été pourvus.
  2. La féminisation du corps des PR se ralentit 28,61 % des lauréats sont des femmes (33,7 % en 2011) [les femmes représentaient 30% des qualifications PR de 2012), mais ce n’est peut-être que temporaire ? En maths (section 25) seule une femme PR a été recrutée (il y avait 25 postes)
  3. En 2012, 215 postes ont été publiés dans le cadre des recrutements au « fil de l’eau ». En 2010 : 513 et en 2011 : 511. Est-ce parce que le “fil de l’eau” est finalement complexe à mettre en oeuvre, ou parce que cela permet des économies ? (le poste étant “gelé” au moins six mois)
  4. 12% des postes sont pourvus par mutation
  5. ces mutations permettent de dessiner quelques unes des trajectoires de mobilité géographique des enseignants-chercheurs (pages 19-21) [voir ici pour les mouvements de 2011]
  6. L’âge moyen est très distinctif : l’âge moyen au premier poste de PR est d’environ 44 ans. En sociologie, il est de 47 ans. En mathématiques, de 40 ans. Des différences aussi fortes existent concernant l’âge au premier recrutement des maîtres de conférences : la moyenne est à 33 ans et demi. 35 ans en sociologie, 30 ans en mathématiques. Les mathématiciens, ainsi, non seulement entrent plus jeunes dans la carrière, mais ils deviennent PR plus rapidement (10 ans en moyenne, contre plus de 12 ans ailleurs)… Les sciences de l’éducation recrutent des MCF qui ont l’âge des mathématiciens devenus professeurs.
    Mais l’âge moyen ne dit pas tout. Voici un graphique qui compare les politiques de recrutement PR de différents groupes de disciplines.
    attente-mcf-pr
    Une autre représentation graphique est plus simple :
    cumul-attente-mcf-pr

  7. toujours concernant l’âge : les auteurs du rapport signalent le ralentissement des carrières : “il y a depuis six ou sept ans un accroissement de l’ancienneté des MCF recrutés PR”
  8. âge encore : les femmes sont recrutées maîtresses de conférences en moyenne à 34 ans, les hommes à 32 ans.
  9. pour les maîtres de conférences : 46% des recrutés de 2012 ont été qualifiés en 2012, 25% des recrutés de 2012 sont des qualifiés de 2011…

Sources : DGRH-A1 (ministère de l’enseignement supérieur), 2013,Campagne de recrutement et d’affectation des maîtres de conférences et des professeurs des universités. Session 2012 [pdf] (mis en ligne en juin 2013)