Prénoms et mentions au bac, édition 2015
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J’ai récupéré les prénoms des quelques 350 000 candidats qui ont obtenu 8 ou plus au bac général et technologique de 2015. Pas pour le plaisir, mais parce que l’étude des prénoms fait partie de mes centres d’intérêt professionnel (je suis l’auteur de Sociologie des prénoms, un petit ouvrage publié par les éditions La Découverte).
Le graphique ci-dessus représente, en abscisse la proportion de mention “Très bien”, et en ordonnées le nombre de candidats, le tout par groupe de prénom. 22% des 328 Joséphine ont obtenu la mention “Très bien”, à comparer avec 2,6% des 982 Dylan. Il y a beaucoup de Camille (près de 4000) et relativement peu d’Alban (environ 200) et leur proportion de mention “Très bien” est semblable (environ 11,5%).
Il est possible de lire le graphique plus en détail.
Au centre du graphique, de haut en bas, on peut lire une transposition du palmarès des naissances de 1997 : Thomas, Alexandre, Nicolas, Camille, Maxime, Lea, Manon, Quentin, Marie sont les prénoms les plus appréciés des parents à cette époque. Mais si Nicolas est au 3e rang des naissances, il est au 13e rang en nombre de candidats au bac général et technologique (ci-après G/T). Un bon nombre de Nicolas n’ont pas survécu jusqu’à la terminale G/T : sortie précoce du système scolaire, orientation vers un bac pro. Les filles survivent mieux : les prénoms féminins comme Camille ou Marie gagnent ont un rang plus élevé dans la population des bacheliers.
Plus largement, certains prénoms gagnent de nombreuses places au palmarès des prénoms fréquents à la naissance et au bac : Joséphine est, en 1997, le 277e prénom le plus donné aux bébés, c’est le 199e prénom le plus fréquent chez les bacheliers G/T. Hortense, Astrid, Segolene, Apolline, Philippine, Annabelle, Lucille, Diane, Eugenie, Mailys, Louison, Lauren ou Mariam gagnent chacunes plus de 80 places. De leur côté les prénoms Cynthia, Nabil, Alison, Esteban, Jordan, Wendy perdent 80 places. Ils survivent moins que d’autre aux rigueurs du système scolaire. C’est ainsi que la population des bacheliers G/T ne ressemble pas à la population des bébés de 1997.
Ainsi, celles et ceux qui survivent le mieux : Joséphine, Apolline, Capucine, Gabrielle, Clotilde, Alix, Adèle, Constance… sont celles et ceux qui obtiennent fréquemment une mention “Très bien”. De l’autre côté, ceux qui ont presque totalement été éliminés (sur les 969 Brandon nés en 1997, nous n’en trouvons plus que 112, c’est à dire 11%, au bac G/T) sont aussi ceux qui obtiennent moins souvent cette mention distinctive.
Prendre comme variable la mention “Très bien” intensifie a priori les écarts entre groupes de prénoms (indicateurs imparfaits de l’origine sociale), et il serait possible de signaler a contrario que 80% des Adèle n’obtiennent pas cette mention. Mais prendre une autre variable (le taux de survie) conduirait à la mise en évidence d’écarts aussi puissants. Quand on comprend que ces deux variables interagissent, l’on comprend que l’école n’est un lieu heureux que pour une toute petite partie d’entre nous.
Pour en savoir plus, vous pouvez examiner les graphiques des années précédentes : 2014,2013, 2012 ou 2011… ou lire Sociologie des prénoms (édition La Découverte) [sur amazon, dans une librairie indépendante].
Par ailleurs un mini-site interactif qui vous permet de consulter les résultats de votre prénom est disponible ici : https://coulmont.com/bac/
17 commentaires
Un commentaire par Mélanie (08/07/2015 à 14:21)
Camille est un prénom mixte pour info
Un commentaire par Didier (08/07/2015 à 15:35)
Une petite réaction à votre commentaire. On peut réussir scolairement sans que l’école soit pour autant un “lieu heureux” personnel.
Un commentaire par Serge (08/07/2015 à 22:58)
Même pourcentage de mention très bien pour les Alexandre, Alexandra, Alexis et axel…
Même pourcentage a peu près pour les Julie et les Jules…
Y a t’il une raison sociologique ?
Aucun Serge dans la liste.
Un commentaire par gachetmauroz (09/07/2015 à 9:43)
Bonjour,
vous devriez faire une appli, qui compile vos données, on tape le prénom et ça donne la proba de réussite au bac ou autres developpement…vous feriez fortune
Un commentaire par Baptiste Coulmont (09/07/2015 à 10:03)
je ne cherche pas à faire fortune, et je propose ceci http://coulmont.com/bac/ : vous pouvez entrer un prénom et vous avez son résultat
Un commentaire par Lhooq (09/07/2015 à 17:36)
Bonjour,
Comme tous les ans je me jette sur ce site et me bats contre ceux qui en concluent qu’il faut appeler leur enfant Joséphine mais j’aurais une demande.
Serait-il possible d’avoir le même genre de nuage et de “Cherche ton prénom et regarde si tu as échappé à ton déterminisme social” pour le taux de personne étant arrivées au bac G/T sur le nombre de personne portant effectivement le même prénom et étant né 18 ans avant (vous le mentionnez dans votre article et n’en faite pourtant pas une visualisation.)
Car, au delà de la réussite effective au bac, si 95% des Joséphine étant nées en 1997 sont arrivées au bac à l’opposé des 22% de Brandon, c’est aussi très intéressant, non ?
Merci beaucoup pour ce travail qui fait comprendre un fragment de la sociologie aux béotiens ;-)
Cordialement,
Lhooq
Un commentaire par Baptiste Coulmont (09/07/2015 à 18:05)
> Lhooq : je pourrais le faire, mais je ne dispose pas toujours précisément de l’année de naissance. Je peux faire des estimations “à la louche”, ce qui donne déjà des ordres de grandeur.
Un commentaire par Lhooq (10/07/2015 à 8:29)
> Baptiste Coulmont : Je profite de la réponse pour corriger mon erreur de frappe, c’était donc “faites” et pas “faite”.
En vous posant la question je me suis en effet dit qu’avec les problèmes du redoublement et du saut de classe ces statistiques n’étaient pas forcément “correctes” mais elles n’en demeurent pas moins parlantes s’il est possible d’avoir une estimation avec un taux d’erreur acceptable, non ?
Un commentaire par Galtier Jean (10/07/2015 à 21:43)
Ce qui est remarquable aussi, c’est la surreprésentation des filles dans les prénoms ayant beaucoup de mentions TB (et j’imagine dans la population des mentions TB) : au dessus de 15%, on trouve seulement 3 prénoms de garçons.
A-t-on une statistique des résultats au bac par mention et par sexe ? (je ne trouve sur l’INSEE que les taux de réussite par sexe, sans les mentions)
Un commentaire par Galtier Jean (10/07/2015 à 21:48)
Finalement, j’ai ma réponse :
http://www.francetvinfo.fr/bac/infographies-sexe-academie-d-origine-filiere-qui-sont-les-eleves-qui-reussissent-le-mieux-au-bac_987971.html
Le nombre de mentions TB chez les filles est de 21318, contre 14627 garçons, alors qu’il y a 235195 candidates et 232388 candidats.
Surreprésentation aussi des filles chez les mention B,
Un commentaire par Damien (11/07/2015 à 10:02)
Bonjour
Une analyse plus pertinente à mon sens serait de classer les prénoms par résultats globaux à l’épreuve et en faire un palmarès. Pourquoi êtes vous parti sur le biais de la mention très bien ?
Un commentaire par Yvan Richardet (11/07/2015 à 15:05)
Vous voudrez peut-être consulter le sixième chapitre de “Freakonomics” (Steven D. Levitt & Stephen J. Dubner): “Peut-on s’appeler Loser et réussir dans la vie”.
Je suis sûr que vous le connaissez, mais ça peut aussi intéresser vos lecteurs sur le même sujet…
Bonne journée!
Un commentaire par Thierry Leclercq (13/07/2015 à 11:33)
merci pour cette brillante étude.
J’en déduis pour ma part que l’attention des parents et leur niveau culturel ( et social ?) sont déterminants dans la réussite scolaire.
Cette attention est perceptible dans le choix du prénom dès la naissance. On sait à la maternité quel genre de parents on a en face. C’est très utile pour le monde social.
Un Brandon, un Kevin, un Bill révèle beaucoup de choses sur les familles et l’avenir de leurs enfants. Pas seulement sur le plan économique, mais même sur le plan culturel, humain, affectif ( je sais que c’est dur à admettre et pas poliquement correct).
Dans l’échec scolaire on a trop souvent tendance à matraquer le système scolaire, et pour le politiquement correct à décharger les familles de leurs responsabilités.
Par contre le succès renforcé des filles, lui, est peut-être dû en effet au système scolaire qui leur est mieux adpaté ?
L’erreur qui pourrait être faite à la lecture de cette étdude, serait d’en déduire qu’en donnant un prénom “valorisant” on augmente les chances de l’enfant.
J’ai plutôt l'”impression que prénom et réussite sont deux conséquences de la qualité des parents.
Un commentaire par Dupond (13/07/2015 à 17:24)
Est ce que Joséphine était prénom à la mode dans les années 95-2000 chez les CS++ bobos parisiens qui donnent des cours particuliers ? Je doute que cette différence soit due à l’éducation nationale ou l’intelligence
Un commentaire par Anon (20/07/2015 à 19:54)
Petite remarque légèrement hors propos :
Je trouve que le vocabulaire et les tournures utilisés pour parler de la représentation des prénoms dans la filière générale particulièrement connotés. Cela donne le sentiment que la filière générale est la seule véritable sortie du secondaire, les autres filières n’étant que des échecs plus ou moins retentissant.
Cela correspond en effet a des positions très répandues en France (j’imagine plus largement dans les catégories CSP+) mais cela manque cruellement de neutralité. Ce n’est pas le fond de l’article donc il n’y a pas mort d’homme, mais c’est dommage pour un texte à la croisée de la sociologie et de l’éducation.
Pour rappel :
“Un bon nombre de Nicolas n’ont pas survécu jusqu’à la terminale G/T : sortie précoce du système scolaire, orientation vers un bac pro. Les filles survivent mieux : les prénoms féminins comme Camille ou Marie gagnent ont un rang plus élevé dans la population des bacheliers.”
Un commentaire par Docteur Oliv (21/07/2015 à 19:58)
Bonsoir,
Vu dans le Canard Enchainé qui a pris Bryan comme exemple avec Mohamed
1er fils Bryan CAP et Brevet Professionnel Cuisine (1990)
2ème fils MaTThias entre en 6 ème Année Médecine (1992)
1 fille Blandine Bac ES cette année proche de la Mention …..AB ( 1996) elle a la chance d’avoir Xanaé comme 2ème Prénom ( J’ai dit que c’était Polynésien ) en fait c’est un Créateur de mots (Voitures CITROEN) qui me l’a suggéré.
Milieu sociaux Père Ingénieur (et fils d’Ingénieur) Mère Dactylo (parents Ouvriers à NANTERRE)
Elle voulait appeller le 1er Kevin mais sa Belle-soeur ayant accouché avant elle a appelé le sien Kevin d’ou une recherche intense ! Bryan, Patrick, Kevin : Les Irlandais que j’ai croisé adorent.
MaTThias Marc, Maurice Grand père Paternel et Maternel
Blandine Xanaé, Aude-Aurore
de quoi nourrir vos réflexions
Un commentaire par mathieu (06/08/2015 à 13:49)
Bonjour
Merci pour votre travail si intéressant.
Une question concernant les Mathieu et Matthieu : le tableaux fait apparaître une différence sensible de réussite au bac avec mention très bien. La distinction ortographique releve t elle d’une différence sociologique et culturelle ?
Je travaille auprès d’un public très précarisé, très majoritairement de niveau scolaire infra 5, j’y côtoie de nombreux Mathieu de moins de 30 ans et jamais aucun Matthieu.
Cordialement