Le goût de l’archive
Il y a plusieurs décennies, mon grand-père avait emprunté au curé de son village, ou au maire, quelques vieux registres où se trouvaient des Coulmont :
Ces registres sont probablement restés un moment sur son bureau, puis dans une armoire. Il en a extrait une page, qui contenait en effet un Coulmont, qu’il avait encadré. Pas besoin de les arracher : ces vieux registres étaient parfois en bien mauvais état.
Sur ces pages, des bouts de vie. Pas que des Coulmont, mais aussi des Poutrain, et bien d’autres… Des noms qui étaient probablement ceux de ses voisins ou de ses cousins.
La preuve qu’on était bien d’ici, et d’ici depuis longtemps, très longtemps. Il n’a jamais construit d’arbre généalogique. Peut-être parce que sa mère était née illégitime, et que, peut-être, ça se savait encore et qu’un arbre l’aurait bien indiqué. Que sa mère était la deuxième épouse de son père… Remonter à 1664, ça permettait de sauter par dessus l’histoire récente.
Ces registres, ainsi que la page encadrée qui prouvait l’ancienneté des Coulmont, leur droit à se dire d’ici, mon père en a hérité.
Il lui était difficile de s’en détacher : que faire de ces gros livres un peu encombrants, quand même. Des registres qui étaient juste les registres de son père, qui ne servaient plus à dire grand chose, depuis que, de déménagements en déménagements, l’ici avait changé, et que, si on avait un jour été de là-bas, ce là-bas était loin.
Mais fallait-il en hériter à mon tour ? Mon goût de l’archive est autre. J’ai le goût des Archives.
Or, le site des archives départementales indiquait quelques manques… Peut-être que le moment était venu que les Coulmont de mes registres rejoignent les Coulmont des autres registres.
[Photographies : Run]
[yarpp]
1 commentaire
Un commentaire par Mutatis mutandis (20/11/2023 à 12:53)
Joli récit, belle fin.