Virilisme et automobile
La voiture a longtemps été un symbole masculin. Si bien que, comme pour la chirurgie ou la profession d’avocat, l’on connaît le nom de la première femme à avoir obtenu un permis de conduire : « la Duchesse d’Uzès, la première femme au monde à avoir bénéficié d’un permis de conduire… » (dixit ce site). Que ce soit vrai ou non ne change rien : entre mécanique rutilante et crasse du mécanisme interne, la voiture, le camion, la camionnette ou le quatre-quatre furent longtemps, de fait, des territoires réservés.
Il n’en va, évidemment, plus de même aujourd’hui. Il est même probable que, comme pour la réussite scolaire dans le secondaire, les femmes décrochent plus fréquemment que les hommes le permis de conduire. Les grosses voitures ne sont pas épargnées, et il n’est peut-être pas de meilleur exemple que les Etats-Unis, où Hummers et autres petits tanks sont conduits aussi bien par des hommes que par des femmes. La voiture, mais aussi le pick-up, finissent par devenir des équivalents symboliques de la matrice originelle : les conducteurs et conductrices y passent un temps important, ils s’y sentent bien, l’aménagement y est organique…
En bref, la voiture est dévirilisée.
Cela explique peut-être l’émergence de testicules artificiels attachés à l’arrière des voitures les plus susceptibles de virilisation, les Truck Nutz, Truck Nuts, ou Truck Balls…
Des voitures qui en ont… Il était difficile de reviriliser plus explicitement ces automobiles, même si le résultat est un peu ridicule. On ne peut exclure un certain humour potache à vouloir ainsi animaliser son véhicule (qui transparait fort bien sur le site de ce fournisseur), et surtout, à donner à voir à ceux qui suivent un spectacle peut-être humiliant — pour celui qui regarde (similaire à ce rituel d’humiliation, le teabagging).
Les oppositions à l’exposition de fausses parties privées se sont donc faites entendre : Fake Private Parts Are No Joke, Myers Says titrait, récemment, le Washington Post : un député du Maryland, les trouvant vulgaires et immorales, cherche à légiférer et interdire leur utilisation (House Bill 1163).
His bill would prohibit motorists from displaying anything resembling or depicting “anatomically correct” or “less than completely and opaquely covered” human or animal genitals, human buttocks or female breasts. The offense would carry a penalty.
traduction partielle : Son projet de loi cherche à interdire aux automobilistes d’exposer ce qui ressemble ou représente des organes génitaux humains ou animaux, des fesses humaines ou des poitrines nues féminines, qui seraient “anatomiquement correctes” ou “incomplètement couvertes ou opacifiées”.
“Nettoyons nos rues, pour nos enfants”, dit-il plus loin dans l’interview.
La revirilisation automobile est donc une initiative contestée : il est probable, avec ces “truck nuts” — sex toys paradoxaux — que l’automobile soit définitivement sortie de l’empire masculine.