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Cinquantes nuances de trop

Vous parcourez peut-être ces lignes parce que vous venez de lire le billet publié dans Le Monde, à la une du cahier « Science & Médecine » du mercredi 14 octobre 2015, et que vous avez voulu en savoir un peu plus ?
J’ai choisi cette semaine de mentionner un texte de Kieran Healy, Fuck Nuance (“Au diable les nuances”), communication présentée au dernier congrès de l’association américaine de sociologie. Kieran Healy est sociologue à Duke University. Il est l’auteur de travaux sur la visualisation des données, par exemple sur les décès par arme à feu aux Etats-Unis. Je signale aussi ce billet, “De l’usage des métadonnées pour retrouver Paul Revere”.
Vous trouverez sur son site d’autres informations.

Sa communication a suscité plusieurs réactions, à l’extérieur de la sociologie notamment :

  1. http://chronicle.com/article/Is-Nuance-Overrated-/232771/
  2. http://publishingarchaeology.blogspot.fr/2015/09/against-nuance.html
  3. http://www.env-econ.net/2015/09/fuck-nuance.html
  4. http://secondlanguage.blogspot.fr/2015/09/fact-and-nuance-3.html
  5. http://bigthink.com/neurobonkers/the-problem-with-nuance-for-the-sake-of-nuance
  6. http://thesphinxblog.com/2015/09/09/bollocks-to-nero/
  7. http://dailynous.com/2015/09/02/a-bias-against-simplicity/
  8. https://redflag.org.au/article/nuance-hell-drug
  9. http://taylorholmes.com/2015/09/09/our-extreme-nuancing-trend/

et en français sur Slate par Aude Lorriaux : http://www.slate.fr/story/106247/fuck-nuances-sciences-humaines-surplace

Prénoms et mentions au bac, édition 2015

bac2015mentionprenoms
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J’ai récupéré les prénoms des quelques 350 000 candidats qui ont obtenu 8 ou plus au bac général et technologique de 2015. Pas pour le plaisir, mais parce que l’étude des prénoms fait partie de mes centres d’intérêt professionnel (je suis l’auteur de Sociologie des prénoms, un petit ouvrage publié par les éditions La Découverte).
Le graphique ci-dessus représente, en abscisse la proportion de mention “Très bien”, et en ordonnées le nombre de candidats, le tout par groupe de prénom. 22% des 328 Joséphine ont obtenu la mention “Très bien”, à comparer avec 2,6% des 982 Dylan. Il y a beaucoup de Camille (près de 4000) et relativement peu d’Alban (environ 200) et leur proportion de mention “Très bien” est semblable (environ 11,5%).
Il est possible de lire le graphique plus en détail.
Au centre du graphique, de haut en bas, on peut lire une transposition du palmarès des naissances de 1997 : Thomas, Alexandre, Nicolas, Camille, Maxime, Lea, Manon, Quentin, Marie sont les prénoms les plus appréciés des parents à cette époque. Mais si Nicolas est au 3e rang des naissances, il est au 13e rang en nombre de candidats au bac général et technologique (ci-après G/T). Un bon nombre de Nicolas n’ont pas survécu jusqu’à la terminale G/T : sortie précoce du système scolaire, orientation vers un bac pro. Les filles survivent mieux : les prénoms féminins comme Camille ou Marie gagnent ont un rang plus élevé dans la population des bacheliers.
Plus largement, certains prénoms gagnent de nombreuses places au palmarès des prénoms fréquents à la naissance et au bac : Joséphine est, en 1997, le 277e prénom le plus donné aux bébés, c’est le 199e prénom le plus fréquent chez les bacheliers G/T. Hortense, Astrid, Segolene, Apolline, Philippine, Annabelle, Lucille, Diane, Eugenie, Mailys, Louison, Lauren ou Mariam gagnent chacunes plus de 80 places. De leur côté les prénoms Cynthia, Nabil, Alison, Esteban, Jordan, Wendy perdent 80 places. Ils survivent moins que d’autre aux rigueurs du système scolaire. C’est ainsi que la population des bacheliers G/T ne ressemble pas à la population des bébés de 1997.
Ainsi, celles et ceux qui survivent le mieux : Joséphine, Apolline, Capucine, Gabrielle, Clotilde, Alix, Adèle, Constance… sont celles et ceux qui obtiennent fréquemment une mention “Très bien”. De l’autre côté, ceux qui ont presque totalement été éliminés (sur les 969 Brandon nés en 1997, nous n’en trouvons plus que 112, c’est à dire 11%, au bac G/T) sont aussi ceux qui obtiennent moins souvent cette mention distinctive.
Prendre comme variable la mention “Très bien” intensifie a priori les écarts entre groupes de prénoms (indicateurs imparfaits de l’origine sociale), et il serait possible de signaler a contrario que 80% des Adèle n’obtiennent pas cette mention. Mais prendre une autre variable (le taux de survie) conduirait à la mise en évidence d’écarts aussi puissants. Quand on comprend que ces deux variables interagissent, l’on comprend que l’école n’est un lieu heureux que pour une toute petite partie d’entre nous.

 

Pour en savoir plus, vous pouvez examiner les graphiques des années précédentes : 2014,2013, 2012 ou 2011… ou lire Sociologie des prénoms (édition La Découverte) [sur amazon, dans une librairie indépendante].
Par ailleurs un mini-site interactif qui vous permet de consulter les résultats de votre prénom est disponible ici : https://coulmont.com/bac/

Modes bourgeoises

Chaque année, Le Figaro publie un palmarès des prénoms les plus fréquents dans les faire-parts de naissance du “Carnet du jour”. Formidable observatoire des convenances de la bourgeoisie parisienne et de la noblesse française.
Le Carnet des prénoms 2015 vient d’être publié. “Comment choisir le bon prénom ?”, et surtout “des prénoms chics, raffinés et charmants !” se demandent les rédacteurs de ce palmarès. Un palmarès, en effet, ce n’est pas qu’une compilation des actes passés, c’est parfois un guide pour les pratiques du futur.

Et l’on découvre l’appétence de certains et certaines pour Constance, Joséphine, Arthur ou Oscar.

carnet-prenoms-2015

L’on remarquera que, en 2015, alors que plus d’un tiers des filles, en France, naissent avec un prénom qui se termine en -A (Sarah, Léa, Nina…) ce n’est pas un goût bourgeois, qui préfère qu’un prénom féminin se termine avec les sons -S, -N, -D, -R, -Z, -X, -T, ou -L… ou -I, à la rigueur.

Le Carnet propose même, cette année, un retour en arrière de 20 ans et 10 ans, ce qui permet de repérer du changement dans la permanence :
carnet-1994-2004

Cela dit, si vous avez une particule (voire deux), ne choisissez pas dans cette liste. Choisissez « Amicie », qui est ce qu’Emma est aux hoi polloi.

amicie

 

Pour en savoir plus : Sociologie des prénoms (La Découverte, 2014)

Les âges et les saisons des tentatives de suicide

On connaît assez bien la saisonnalité des suicides : leur maximum est au printemps, et leur minimum en décembre-janvier. On sait aussi que le taux de suicide augmente avec l’âge (même s’il a tendance à s’égaliser). Qu’en est-il des tentatives de suicide.
Un travail très intéressant a été réalisé par l’INVS (Christine Chan Chee et Delphine Jezewski-Serra (dir). Hospitalisations et recours aux urgences pour tentative de suicide en France métropolitaine à partir du PMSI-MCO 2004-2011 et d’Oscour® 2007-2011.) dans lequel on trouve des informations sur les hospitalisations suite à des tentatives de suicide.
Il ne s’agit donc pas d’informations sur les quelques 200 000 tentatives de suicide réalisées en France chaque année, ni même d’informations sur les tentatives connues par des médecins, ni même de celles qui parviennent aux urgences, mais d’environ 40% de ces tentatives, celles qui ont donné lieu à des hospitalisations.

Le graphique suivant représente l’écart mensuel à la moyenne. Certains mois comptent plus de tentatives qu’attendu, et d’autres moins. S’il y a environ 7000 hospitalisations par mois, certains mois sont à 8000, d’autres à 6000.
L’interprétation des variations est compliquée. Comment comprendre la diminution en août ? Dans une perspective durkheimienne classique il s’agirait des conséquences du repos social : la société est moins “effervescente” en août : «il se produit durant la belle saison un véritable exode des principaux agents de la vie publique, qui, par suite, manifeste une légère tendance au ralentissement» (p.106).
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Saisonnalité des tentatives de suicide [voir note méthodologique plus bas]

Ce ralentissement pourrait se percevoir aussi en décembre et avril, au moment des congés scolaires. Mais ne peut-on pas, dans une autre perspective, voir dans cette saisonnalité le reflet de l’activité hospitalière ? La baisse des hospitalisations en août peut-elle être liée à un nombre moins élevé de lits disponibles en raison des congés? Comment, dans ce cas, expliquer le grand nombre de tentatives en juin? Les examens ? Il faudrait pouvoir disposer d’indications quantifiées sur la saisonnalité de l’ensemble des tentatives de suicide (mais elles échappent en partie à tout enregistrement).

Le deuxième graphique met formidablement bien en lumière les différences entre hommes et femmes. Les tentatives de suicides sont surtout des tentatives féminines, quel que soit l’âge (il n’y a égalité que vers 30 ans, et après 80 ans).
Il met aussi en évidence la fréquence importante des hospitalisations des jeunes femmes, entre 15 et 19 ans. Est-ce parce que leur mal-être est plus médicalisé que celui des jeunes hommes ? Est-ce alors un effet du diagnostic médical aux urgences ? Est-ce parce qu’elles font réellement plus de tentatives de suicide (les jeunes hommes pouvant faire des accidents de scooter, de mobylette, de voiture…)? Peut-on y voir le caractère morbidifère du lycée, de ses rythmes, de ses examens, de ses classements, pour une population — les jeunes femmes — plus scolaires que les jeunes hommes ?
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Taux d’hospitalisation pour tentative de suicide, pour 10 000 habitants.

Disposer des données individuelles, avec l’âge, le sexe et la date de l’hospitalisation, permettrait d’en savoir plus. La saisonnalité des tentatives des jeunes femmes diffère-t-elle de celles des femmes plus âgées, et de celles des hommes ? Est-elle liée aux rythmes scolaires (dates du bac, date des congés)?

 
Pour une mise en contexte plus large sur ce thème, vous pouvez consulter : Sociologie du Suicide (pdf).
 

Note méthodologique : C. Chan Chee de l’INVS, avec qui j’ai eu un échange par mail, m’indique ceci concernant la saisonnalité des hospitalisations : «pour des raisons de confidentialité, nous n’avons accès qu’aux mois et année de sortie ainsi qu’à la durée de séjour. La date de sortie a donc été estimée au 15 du mois, et la durée de séjour a été soustraite, pour obtenir une date approximative d’entrée. A priori, je pense que le biais n’est pas trop grand car la durée de séjour est moins d’une semaine pour 90 % des patients.»

Sociologie de l’autolib

Les pastiches des prétentions scientifiques sont relativement nombreux. Et la publication d’un pastiche de maffesolisme m’incite à proposer une petite liste :

  1. Marcel Proust est l’auteur d’un multipastiche savoureux d’un texte de Sainte-Beuve critiquant un pastiche de Flaubert lui aussi écrit par Proust, dans Pastiches et mélanges [plus de 109 citations sur google scholar]
  2. Cantatrix sopranica L. : Experimental demonstration of the tomatotopic organization in the Soprano de George Perec (en pdf ici) — 36 citations sur google scholar
  3. Le rond et le sobre, parodie de Claude Levi-Strauss (dont avait parlé Histoires à lunettes)
  4. L’effet ‘yau de poèle de François George, sur le lacanisme. Je n’ai pas d’extrait à proposer, mais une émission de Bernard Pivot, où F. George était invité : A quoi servent les philosophes ? [29 citations sur google scholar]
  5. Body ritual among the nacirema de Horace Miner, qui se moque probablement des sociologues utilisant le langage des anthropologues culturalistes. J’en avais parlé un peu ici (chose amusante, cet article avait été publié, avec un clin d’oeil appuyé, dans The American Anthropologist) [plus de 450 citations sur google scholar]
  6. Transgressing the Boundaries: Towards a Transformative Hermeneutics of Quantum Gravity de Alan Sokal, qui pastiche ce qu’aurait pu écrire un physicien transi par Derrida et Latour. (Chose amusante, la revue Social Text n’y avait vu que du feu) [1116 citations sur google scholar].
  7. et il y aura, maintenant « Automobilités postmodernes : quand l’Autolib’ fait sensation à Paris », un article écrit en maffesoli, publié dans une revue dirigée par Maffesoli (Sociétés) :

    Manuel Quinon et Arnaud Saint-Martin expliquent comment et pourquoi ils ont mystifié la rédaction de la revue Sociétés, tribune éditoriale d’une certaine « sociologie postmoderne »

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Ton prénom n’est pas unique

Chaque personne est unique, mais son prénom beaucoup moins. Coca-Cola l’a bien compris (faisons ici comme si Coca était une personne).
Depuis quelques années, Coca édite des canettes “personnalisées” : une centaine de prénoms d’abord, puis plus de 250 (été 2013), et enfin, cette année, 1000 prénoms.
Ainsi, une bonne partie de la population née en France est couverte par cette personnalisation. Avec 1000 prénoms, c’est presque 80% des personnes nées vers 2000 qui peuvent trouver bouteille à leur nom, et plus de 60% des jeunes enfants nés vers 2010.
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Mais 1000 prénoms ne couvrent pas toute la population. Plusieurs prénoms sont absents de la liste, dont la transcription francophone de celui du prophète de l’Islam. Mais aussi Georgette, Mauricette, Marcelle, Renée, Simone, qui ne se trouvent pas dans le cœur de cible de la marque (en revanche, les Mathis, Léna, Hugo, Maelys, nés vers 2010, peuvent se trouver sur des canettes).
Voici les 50 plus “gros” prénoms ne se trouvant pas dans la liste 2014 des prénoms-Coca.
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De fait, une bonne proportion des personnes nées avant 1930 sont décédées… Il reste peu de Simone en vie par comparaison aux Simone nées.
Une autre manière de représenter l’intérêt pour certaines générations est de se concentrer sur la proportion du “top 100” ou du “top 1000” couvert par la liste des 1000 prénoms Coca. Tous les prénoms du “Top 100” après 1950 sont dans la liste. Coca s’intéresse bien aux prénoms les plus répandus. Mais Coca est plus sélectif quand on compare avec le “Top 1000” des prénoms les plus répandus une année données. Ainsi, au maximum, seuls 80% des prénoms du “Top 1000” de 1990 (les 1000 prénoms les plus donnés aux bébés cette année-là) se trouvent dans la liste Coca.
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Il y a donc une liste d’environ 200 prénoms qui se trouvent dans cette liste et qui ne devraient pas s’y trouver si Coca suivait uniquement la liste des fréquences.

Prénoms et mentions au bac, édition 2014

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Cliquez pour une image plus lisible

[Avec Rue89]
La réussite scolaire varie en fonction de l’origine sociale, du niveau de diplôme des parents et du sexe des lycéens. Le choix des prénoms varie aussi avec ces mêmes critères (origine, diplôme, sexe de l’enfant). C’est pourquoi en 2014 environ 20% des Agathe, Jeanne et Gabrielle (qui ont eu plus de 8/20 au bac) ont obtenu la mention « Très bien », c’est à dire dix fois plus que les Dylan, Jordan ou Steven. L’année dernière, ces prénoms étaient déjà à la même place.
Les prénoms les plus donnés vers 1996, Manon, Thomas, Camille et Marie, se répartissent autour de la moyenne. 9% des bacheliers ont obtenu la plus haute mention, c’est le cas de 8,5% des Thomas et 10% des Camille. Les Manon passent plus souvent au rattrapage (ou sans mention) que les Marie (qui réussissent un peu mieux). Le sociologue pensera rapidement que les Marie nées vers 1996 sont plus souvent filles de cadres que les Manon.
Ce graphique donne ainsi à voir, en touchant les individus au plus profond d’eux-même (à travers le prénom), un espace social inégalitaire. Les parents des Cassandra et Cindy, en 1996, trouvaient sans doute affreux des prénoms tels que Diane ou Zoé (des prénoms de chiens ou d’arrière-grand-mère). Ceux des Félix et des Augustin, parions-le, soupiraient en entendant Killian ou Dylan : « quel mauvais goût ! ».
En filigrane, le même graphique donne à voir, à travers certains prénoms — Mohamed, Anissa, Inès — ceux qui sont probablement les (petits-)enfants de migrants du Maghreb, dont la place est ici équivalente à celle des enfants d’ouvriers et d’employés : Mickael ou Mohamed, Mehdi ou Dorian, sont ici à la même position.
Note : le graphique a été réalisé à partir des résultats nominatifs d’un peu plus de 310 000 individus ayant eu plus de 8/20 au bac 2014. Les données manquaient pour quelques départements, mais il y a fort à parier que ces données en plus ne bouleverseront pas l’analyse.
Pour en savoir plus, vous pouvez lire Sociologie des prénoms (édition La Découverte) [sur amazon, dans une librairie indépendante], et regarder les graphiques des années précédentes : 2013, 2012 ou 2011
Un mini-site interactif est disponible ici : https://coulmont.com/bac/

Marie, Marie, Marie : d’un genre trouble, classique et classant

Quoi de plus classique que le prénom « Marie » ? Quoi de plus classant que le prénom « Marie » ? Mais que classe Marie ? La classe ou le genre ?
En s’appuyant sur les listes électorales parisiennes, il est possible d’explorer certains des usages sociaux de ce prénom, à Paris du moins.
Depuis la fin des années Trente, ce prénom (sous la forme simple « Marie » ou sous la forme composée « Marie-Prénom ») est de moins en moins choisi par les parents. Il reste plus fréquent chez les familles “à particule” : deux fois plus fréquent chez les porteuses de particules que pour l’ensemble des électrices. C’est un “classique” certe, mais un classique en crise.
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Il n’en va pas de même en deuxième, troisième, quatrième… sixième position. Si appeler sa fille « Marie » est d’un classique un peu démodé (« c’est d’un classique… »), appeler sa fille « Domitille, Marie » l’est moins. En positions secondaires, « Marie » n’est pas en crise. Les électrices nées récemment exhibent plus souvent que les électrices nées vers 1970, sur leur carte d’identité et leur carte d’électrice, le prénom secondaire “Marie”. Et les électrices à particule, depuis le début du XXe siècle, sont de manière croissante des « Marie secondaires ». Elles le sont, en moyenne, 4 fois plus fréquemment que l’ensemble des électrices.
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Et à cette position secondaire, pour les familles à particules, « Marie » n’est pas marqueur de genre. Les hommes électeurs à particule ont aussi souvent « Marie » comme deuxième prénom que les électrices à particule. Ce n’est pas le cas de l’ensemble des électeurs hommes, qui, certes, ont assez souvent une « Marie » dans l’ensemble de leurs prénoms, mais beaucoup moins que les électrices.
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Féminin en première position, aristocratique en seconde position : Marie est toujours utile.

Après le colloque

Le colloque que je co-organisais avec Virginie Descoutures a eu lieu mercredi dernier. Voici quelques notes…
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Des contributions intéressantes, des discussions animées, une salle remplie… Virginie et moi sommes contents de cette journée. Nous allons maintenant travailler aux suites à donner à ce colloque : actes ? numéro thématique d’une revue ?
Cela prendra du temps, l’édition académique avançant à son rythme propre. Mais si vous souhaitez prendre connaissance de quelques uns des thèmes traités dans les communications, vous pouvez d’ores et déjà lire cet article, paru dans le Libé de ce matin :
liberation-colloque
[article dont l’accès est pour le moment réservé aux abonnés à Libé]
.

Plusieurs journalistes ont été intéressés par le colloque (sans nécessairement y assister, à la différence de M.-J. Gros, de Libération qui avait pris soin de s’inscrire), et notamment par un des fils directeurs, selon lequel la grande liberté de choix dont dispose les parents ne conduit pas à l’anomie.

panorama-colloque2
Comme vous pouvez le voir sur la photo ci-dessus, une caméra est venue un moment filmer la salle. Un petit reportage a été diffusé dans le “12-13” (et dans le “19-20”) de France 3. Ces journalistes avaient été mis sur la piste du colloque par un article d’une page dans Le Parisien le matin-même :
colloque-leparisien
La capacité de ce quotidien à faire l’information est impressionnante : à 10h, l’attachée de presse de la collection “Repères” (que je n’avais pas pensé à avertir du colloque) m’envoie un mail :

Bonjour Baptiste,
Juste ce mot pour savoir s’il y a une actu particulière aujourd’hui ou si vous avez eu écho de la sortie d’un film ou autre en rapport avec les prénoms?
En effet, deux journalistes ce matin m’ont demandé vos coordonnées dont une de France info pour le journal de 12h, intw de 4 minutes…

Il y eu donc des interviews sur France Info (par téléphone), sur France Inter (les journalistes se sont déplacés), sur Sud Radio (le lendemain). Un article dans Ouest-France aussi, le lendemain, dans lequel — et c’est ironique — mon prénom change :
ouestfrance-colloque

Les amis de mes amis sont directeurs de thèse

Voici plusieurs graphes établis à partir des codirections de thèse en France.

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Les couleurs indiquent les disciplines des directeurs.

Et l’on constate que les disciplines “proches” (socio / histoire) ont tendance à se retrouver à proximité sur le graphique.
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On peut s’intéresser de plus près aux thèses codirigées inscrites dans une discipline particulière, par exemple, au hasard, la sociologie. [cliquez pour voir en grand]
socio-reseau
Dans ce dernier graphique, les couleurs placent ensemble des individus que l’algorithme walktrap.community a placé dans la même “communauté”. Globalement “ça fait sens”. Et l’on ne remerciera jamais assez Nicky Le Feuvre de servir de “bridge” entre des mondes distincts.

Le même graphique pour l’histoire, pour la philosophie et directement en images pour l’économie
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Comment ont été construits ces graphes :

Grâce à @cynorrhodon (qui avait étudié la longueur des titres de thèse), j’ai récupéré des informations sur plus de 315 000 thèses françaises (oui, 315 000). Parmi ces thèses, un peu plus de 38 000 thèses sont effectuées ou ont été effectuées en codirection. En général, cela implique deux directeurs ou directrices de thèse, mais parfois trois ou quatre. Très très rarement plus.
Chaque thèse est associée à une discipline au moins, parfois deux ou trois.
La base ainsi constituée est relativement sale, et il a fallu la nettoyer un peu, en normalisant les noms et prénoms. Ceci fut fait de manière automatisée et rapide, sans chercher à dissocier “Jean Dupont” professeur de Mathématiques à Rennes 2 et “Jean Dupont” professeur de sociologie à Montpellier 3. J’espère qu’ils ne sont pas très nombreux à être ainsi homonymes. De même je n’ai pas cherché à indiquer que J. Dupont, professeur de mathématiques à Montpellier 3 est la même personne que Jean Dupont professeur de mathématiques à Montpellier 3.
Se posait ensuite un problème d’association, entre une personne et une discipline. Un seul exemple, Stéphane Beaud, sociologue, apparaissait 7 fois comme “sociologues”, et à une reprise comme “Sciences de la société”. Julia Kristeva apparaissait 15 fois comme “littérature française” et sinon sous de multiples autres disciplines. J’ai donc considéré que la discipline à retenir était celle qui était le plus souvent associée avec une personne.
Le réseau comprenait un grand nombre de liens et de personnes. J’ai donc réduit ce réseau aux individus qui avaient au moins N liens, et je n’ai gardé que la plus grosse composante (pour produire les graphes représentés).
Il y a un grand nombre de disciplines différentes, plus de 4 400. Parfois un intitulé généraliste est proposé : “Sociologie” ou “Chimie”, parfois, c’est un indicateur très précis, comme “Anthropologie psychanalytique et pratiques cliniques du corps” ou “Chimie organique, minerale, analytique, industrielle” ou encore (sans correction) “Ingenierie de la cognition, de linteraction, de lapprentissage et de la creation Sciences du langage”. Pour associer des couleurs aux points, je cherche donc la présence d’une chaine de caractère dans la discipline. “Socio” pour tout ce qui est sociologie, socioanthropologie… “politi” pour tout ce qui est science politique, sciences politiques.

Le graphique spécifique à la sociologie illustre certaines des difficultés : l’on repèrera que des individus identiques apparaissent sous deux formes nominales… et sont donc considérés comme deux individus différents. Je n’ai gardé que les individus ayant participé à deux codirections ou plus (les individus qui n’ont participé qu’à une seule codirection ont disparu).